1973, c'est l'année du cessez le feu au Vietnam, du coup d'état de Pinochet au Chili, de l'affaire du Watergate, mais, c'est, aussi, l'année de mes 18 ans. Batteur de Hard Rock dans un groupe qui s'appelle MOBY DICK, je suis, par ailleurs, élève en Première Littéraire au Lycée Louis Barthou de Pau, avec, en fin d'année scolaire, l'échéance du Bac de Français, fixée au mois de Juin.
En attendant cette date fatidique, vu que l'actualité musicale venant d'Outre Manche ou d'Outre Atlantique semblait particulièrement riche, je ne pouvais résister à cette vague de pépites en vinyle qui allaient débarquer dans l'Hexagone tout au long de l'année.
Ainsi, dès le mois de JANVIER, avec mes étrennes du Premier de l'An, je saute sur l'occasion pour aller chez mon Disquaire Palois habituel, afin de me procurer le nouvel album de :
- DEEP PURPLE: "Who Do We Think We Are"
Après "In Rock", "Fireball", "Machine Head" et "Made In Japan", (quatre précieux vinyles siégeant déjà dans ma discothèque), la Dream Team de DEEP PURPLE, la fameuse Mark II (Ian Gillan, Richie Blackmore, Jon Lord, Ian Paice et Roger Glover) livre un nouvel album, certes toujours avec les mêmes codes de création, mais, néanmoins, avec une force d'inspiration un petit peu amoindrie par rapports aux albums précédents. Ceci peut s'expliquer par la fatigue accumulée après 18 mois de tournée, mais, aussi, par quelques tensions internes qui aboutiront au départ du chanteur Ian Gillan, puis, plus tard, à celui du bassiste Roger Glover. Néanmoins, malgré ce contexte, "Who Do We Think We Are" s'avère être un album honnête avec quelques bons moments. D'abord, le fameux “Woman From Tokyo", avec son intro envoutante et son piano Jazzy. “Rat Bat Blue”, avec son riff ensorcelant. Le très mélodique "Mary Long", avec son coté enjoué et son refrain fédérateur. Le rapide “Smooth Dancer” qui se rapproche un peu du "Speed King" de "In Rock", ou, encore, le très Bluesy “Place In Line”. Deux autres titres plus faibles complètent l'album, le trop lisse "Super Trouper" et le très pale "Our Lady". Dans les Hit Parades des ventes, l'album se classera 4e au Royaume Uni, et, quinzième aux Etats Unis. Quant à la France, l'album sera certifié Disque d'Or avec 100 000 exemplaires vendus. Comme quoi!....
- AEROSMITH: "Aerosmith"
En ce même mois de Janvier 1973, arrive, également, dans les bacs, le premier opus d'un tout nouveau groupe Américain: AEROSMITH. A la première écoute, le son parait rugueux et brut de décoffrage. Dès l'ouverture, le génial "Make It", donne véritablement le ton et définie littéralement le style AEROSMITH, avec la voix cuivrée du chanteur Steven Tyler et sa façon originale de chevroter les mots, mais, aussi, avec les riffs de guitare carrés et bien pensés distillés par Joe Perry et Brad Whitford, soutenus par une section rythmique en osmose parfaite formée par le bassiste Tom Hamilton et le batteur Joey Kramer. Parmi les autres moments forts de l'album, on savoure "Dream On", l'énormissime ballade qui donne le frisson, avec sa guitare mélodique et la voix fragile de Steven Tyler qui monte en puissance. On se régale, encore, sur le sublime "One Way Street", avec son intro Bluesy à l'harmonica et son riff de guitare efficace qui fait taper du pied, mais, également, sur l'excellent "Mama Kin", avec son saxophone à l'intro, sa voix puissante et son riff de guitare imparable. A noter, aussi, la superbe version dépoussiérée du standard de Rythm'n'Blues, "Walking The Dog", créé par Rufus Thomas. Totalement réarrangée à la sauce AEROSMITH, cette version est nettement supérieure à celle déjà revisitée par les Rolling Stones en 1964. 58 semaines dans les Charts Américains, le disque culminera à la 21ème place.
MOIS DE FEVRIER 1973
- IGGY POP AND THE STOOGES "Raw Power"
En Septembre 1971, les STOOGES n'existent plus. Tony De Fries, le producteur de David Bowie, rencontre le chanteur IGGY POP et lui propose de produire son premier album solo. Début 1972, parti en Angleterre, Iggy rappelle ses anciens acolytes des STOOGES, le guitariste James Williamson, le batteur Scott Ashton, et, son frère Ron, pour le coup, devenu bassiste. Septembre 1972, la formation, désormais baptisée IGGY AND THE STOOGES, enregistre “Raw Power". Mixé par David Bowie, l'album sortira le 07 Février 1973. Le disque démarre avec un brulot de haute volée, baptisé "Search And Distroy", étoffé par la guitare fougueuse de James Williamson, conjugué à la hargne d'Iggy Pop et le tout propulsé par la rythmique implacable des Frères Ashton. Dans la même veine, on trouve “Your Pretty Face Is Going To Hell”, avec sa déferlante de notes de guitare qui déboulent tous azimuts, mais, aussi, “Raw Power” et "Shake Appeal", dotés, tous deux, de solos incendiaires signé James Williamson, ou, enfin,“Death Trip”, avec un IGGY particulièrement hystérique. On savoure, aussi, des ambiances plus nuancées, avec la voix envoutante d'IGGY sur “Gimme Danger", avec le riff ensorcelant de “Penetration”, ou, enfin, le groove hypnotique du superbe "I Need Somebody". Aux U.S.A, "Raw Power" culminera à la 182ème place pendant 3 semaines.
- BLUE OYSTER CULT "Tyranny And Mutation"
Après un excellent premier album, assez froid et rigide, paru en 1972, la formation Américaine bouscule encore les codes avec ce deuxième opus d'une rigueur presque mathématique, mais quelque peu déstabilisante. L'expérimental "7 Screaming Diz-Busters" en est l'exemple parfait avec ses vocaux délirants, ses changements de rythmes à répétition et ses solos de guitare en cascade. Ajoutons des titres plus Hard Rock aux accents Psychédéliques tels que le très rapide "The Red & The Black", le bien Heavy "Hot Rails To Hell", ou encore le très entrainant "Teen Archer", qui, tous les trois, bénéficient d'arrangements époustouflants subtilement dosés. On trouve, également, des titres plus sophistiqués tels que "Baby Ice Dog", assez Pop dans l'esprit, avec un texte signé Patti Smith, ou, plus baroque encore, à l'image de "Wings Wetted Down", mais, aussi, de "Mistress Of The Salmon Salt". Quant à "O.D’d On Life Itself", le titre le plus carré de l'album, il est plutôt bâti comme un bon vieux Rock'n’Roll merveilleusement rassurant. Au final, "Tyranny And Mutation" atteignit la 122ème place du Bilboard 200, aux Etats Unis, et, y restera pendant 13 semaines.
MOIS DE MARS 1973:
LED ZEPPELIN "Houses Of The Holy"
Déjà en possession des quatre premiers albums du Dirigeable, il était impossible, pour moi, de ne pas me procurer ce cinquième opus, qui, pour la première fois, possédait un titre, à savoir: "Houses Of The Holy". Dès l'ouverture, on a droit à "The Song Remains The Same", une longue suite progressive, sorte de déluge de guitare multicolore avec quelques paroles de Robert Plant chantées ici ou là. Même approche Progressive sur le sublime "No Quarter", avec son climat pesant, son tempo hypnotique bien frappé par Bonham, ses divers claviers joués par Jones, la voix de Plant passée au transformateur et, enfin, la guitare de Page qui alterne les sons. On savoure, également, les très mélodiques "Rain Song" et "Over The Hills And Faraway", ou, encore, "The Ocean", avec son riff imparable et son gimmick vocal très harmonieux. Les trois autres morceaux proposent des sonorités nouvelles, tels que le très enjoué "D'yer Mak'er", avec son atmosphère Jamaïcaine aux couleurs du Reggae, mais, aussi, le très Funky "The Crunge", avec ses ambiances en mode James Brown, ou, enfin, le très expérimental "Dancing Days", avec son riff qui exprime la moiteur d'un climat malsain. Bref, au final, "Houses Of The Holy" se classa 1er aux Etats Unis, restant 106 semaines à la même place, 1er également en Angleterre pendant 16 semaines, et, en France, l'album atteignit la 3ème place sur une durée de 36 semaines.
MOIS d'AVRIL 1973:
BECK, BOGERT, APPICE "B.B.A"
Après les Cream, après West Bruce And Laing, voilà que dans les bacs apparait le vinyle d'un nouveau super groupe, à savoir BECK, BOGERT, APPICE. Un Power Trio composé de Jeff Beck, le guitariste des mythiques YARDBIRDS et du JEFF BECK GROUP, entouré des légendaires Tim Bogert (basse) et de Carmine Appice (batterie), tous deux ex membres de VANILLA FUDGE et de CACTUS. Autrement dit, un gang de musiciens chevronnés et talentueux en diable réunis pour le meilleur l'espace d'un album. Dès l'intro, sur le percutant "Black Cat Moan", on a droit à du Heavy Blues de haut niveau. Un riff ensorcelant pulsé par une solide rythmique en totale osmose sur laquelle la guitare slide de Jeff Beck rugit à tout va. Même approche sur le très réussi "Superstition", une reprise de Stevie Wonder, revisitée en mode Funk Blues chauffé à blanc, mais, aussi, sur le très Progressif "Lady", le très classique et enlevé "Why Should I Care", ou, enfin, le rapide "Livin' Alone", conjugué en mode Boogie. Histoire d'apporter un équilibre à ce Heavy Blues en fusion, le trio opte pour trois Ballades. D'abord, "Oh To Love You", puis, "Sweet Sweet Surrender",et, enfin, "I'm So Proud". Trois titres très mélodiques et bien nuancés, chantés en totale harmonie, particulièrement agréables à écouter. Du coté des Charts, en Angleterre, l'album atteindra la première place du Top 40 et y restera pendant trois semaines.
MOIS de MAI 1973:
HAWKWIND "Space Ritual Live"
Fan du groupe depuis la sortie du premier album en 1970, je ne résiste pas à me procurer ce quatrième opus, enregistré Live en Décembre 1972 à Londres et à Liverpool. Il existe peu de documents vidéos témoignant de ce que pouvait être, sur scène, ce rituel spatial, élaboré en mode Psychédélique. Il faut imaginer un décor lumineux, des musiciens costumés, des effets spéciaux joués au synthétiseur pour matérialiser l'espace intersidéral, des vidéos projetées sur écran, des poèmes de Science Fiction récités, sans oublier une danseuse aux seins nus totalement habitée et particulièrement envoutante. "Space Ritual" est, donc, le document audio destiné à nourrir notre imagination. Pour exemple, parmi les meilleurs moments, on est totalement propulsé dans l'Espace à l'écoute du très fédérateur "Down Through The Night", mais, aussi, du très Bluesy "Orgone Acumulator", ou, encore, du très Heavy "Time Left This World Today". On a droit, aussi, à de véritables moments de bravoure avec des titres de Hard Rock Spatial d'une rare intensité, particulièrement puissants, et, plus étirés que dans leur version studio. Ainsi, on trouve le superbe "Lord Of The Light", l'excellent "Brainstorm", ou, enfin, le sublime "Master Of The Universe". Au Royaume Uni, l'album atteignit la 6ème place des Charts et y resta pendant 5 semaines. Pour ce qui est des Etats Unis, l'album stagnera à la 179ème place et y restera durant 8 semaines.
MOIS DE JUIN 1973:
TEN YEARS AFTER "Recorded Live"
Fan du groupe depuis "Love Like A Man", tube planétaire sorti en 1970, mais, aussi, grâce au film "Woodstock", qui met en avant l'extraordinaire virtuosité du guitariste Alvin Lee à travers le vertigineux "I'm Going' Home", je délaisse quelque peu mes révisions du Bac de Français pour aller me procurer ce double album Live et l'écouter au plus vite. Outre le mythique "I'm Going Home", légèrement différent de celui de "Woodstock", 11 autres titres nourrissent cette double galette. On se régale, d'abord, avec du Heavy Blues très British magnifié sur l'hypnotique "One Of These Days", puis, sur le très Hendrixien "You Give Me Loving", ou, encore, sur la superbe version revisitée du "Good Morning Little School Girl" de Sonny Boy Williamson. En beaucoup plus Rock, on trouve "Choo Choo Mama", et, en plus enlevé, on a "I Can't Keep From Crying Sometimes", un titre d'Al Kooper qui rappelle un peu les Doors. Coté Blues lent, on est saisi, en premier lieu, par "Slow Blues In C", mais, on savoure, surtout, la magnifique version dépoussiérée du "Help Me", une fois encore de Sonny Boy Williamson. Un Blues déchirant avec ses belles alternances de climats et des solos de guitare mélodiques remarquablement ciselés par Monsieur Alvin Lee. Au final, ce "Recorded Live", classé 36ème en Angleterre et 39ème aux U.S.A, bénéficiera d'un meilleur classement en France en atteignant la 6ème place.
AUTRES ALBUMS EGALEMENT SORTIS LORS DU PREMIER SEMESTRE 1973:
- JANVIER
FREE : "Heartbreaker" -
- FEVRIER
ALICE COOPER: "Billion Dollar Babies"
- MARS
Byrds: "Byrds" - KING CRIMSON: "Larks' Tongues In Aspic" - ROXY MUSIC : "For Your Pleasure"
- AVRIL
David Bowie: "Aladin Sane" - Eagles: "Desperado" - HUMBLE PIE: "Eat it"
- MAI
MIKE OLDFIELD: "Tubular Bells" - BACHMAN TURNER OVERDRIVE: "Bachman Turner Overdrive" - SPOOKY TOOTH: "You Broke My Heart"
-JUIN
BUDGIE : “Never Turn Your Back On A Friend” - URIAH HEEP: "Live"
Vous voulez savoir quels vinyles j'ai pu acheter lors du deuxième semestre 1973? Hé bien, restez branchés sur Rock Meeting, car la suite de cette saga discographique, d'il y a 50 ans, ne saurait tarder. A très vite!...
JOHN MARKUS Plus d'infos à propos de l'auteur ici |
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