Même dans un hôtel trois étoiles, un réveil en festival n'est jamais facile.
On se force un peu quand même à descendre avant 10h pour profiter du petit déjeuner offert. On a en tout cas une vue bucolique de la baie vitrée de la salle de restauration sur les forêts et montagnes qui nous entourent. Et c'est marrant aussi de voir dans un hôtel assez classe plein de metalleux avec des tee-shirts particulièrement rares et/ou cultes ! On ne va quand même pas trop traîner car le programme est chargé aujourd'hui. Quasiment tout le programme m'intéresse, en fait, à part un ou deux groupes. Après avoir retrouvé des Pyrénéens et trinqué avec eux, direction la salle pour le premier concert de la journée.
C'est ETERNAL CHAMPION qui va ouvrir les hostilités. C'est d'ailleurs le cas de le dire puisque le chanteur se ramène sur scène avec une grosse épée qu'il va brandir et jouer avec pendant les trois premiers morceaux ! Il manie bien son glaive, mais ça n'en demeure pas moins kitsch. Par contre musicalement, ça le fait. Le son n'est pas meilleur que la veille mais on n'y prête finalement même plus attention : on est maintenant entièrement dans le trip Keep It True ! Et comme c'est très bien joué, on n'a aucun problème pour rentrer dans la musique d'Eternal Champion. Les Texans sont en tout cas de gros fans des livres de Michael Moorcock (avec un nom pareil, on pouvait s'en douter) et de la musique de Manilla Road. Ce sont, ma foi, de bonnes références. Le chanteur, avec sa voix légèrement nasillarde, a par ailleurs un timbre et des intonations qui rappellent beaucoup Mark Shelton et Hellroadie. J'aime bien leur album "The armour of Ire", qui a d'ailleurs fait l'unanimité chez les amateurs de metal épique. Et le live apporte une autre dimension à leurs chansons. "I am the hammer" est un vrai régal, surtout reprise en choeur par le public. Bref, Eternal Champion ouvre de la meilleure manière cette deuxième journée du KIT 2017
L'une des rares pauses de la journée va se faire pendant TRAITOR'S GATE, groupe anglais de l'époque de la NWOBHM, auteurs d'un album unique intitulé "Devil Takes The High Road" sorti en 1985. Je n'en avais pas écouté une seule note avant le festival. Comme j'adore les groupes suivants, je préfère donc zapper. Du reste, je ne crois pas qu'il y ait lieu d'avoir du regret parce que les échos que j'ai eus de leur prestation étaient plus que mitigés...
C'est ensuite au tour d'un autre groupe de metal US, cette fois récent, qu'on va se prendre une claque avec NIGHT DEMON. Ce groupe se situe dans la nouvelle vague du revival du heavy metal old school, aux côtés de groupes comme Enforcer, Stallion, Hitten, Screamer et tant d'autres. Je trouvais leur premier album, "Cruse of the damned", sympa. "Darkness Remains", le petit nouveau sorti deux semaines avant le festival, est à mon avis encore meilleur. Et en live, les Américains vont tout dévaster ! Ils ne sont que trois sur la scène, mais ce sont des piles atomiques vu l'énergie qu'ils dégagent. En particulier le chanteur bassiste, Jarvis Leatherby, qui est très charismatique. La setlist va être basée principalement sur "Darkness remains" (et pour ma part, tant mieux !), et le groupe est tellement à fond qu'on a l'impression que tous les morceaux sont joués en accéléré. Ca joue vite, bien et fort et ça enchaîne quasiment sans temps mort. Et c'est l'apothéose en rappel quand le groupe revient sur la scène de la Tauberfrankenhalle pour une superbe reprise de "Wasted years" de vous savez qui, qui rend le public hystérique dès les premières notes. En tout cas, c'est une superbe prestation que les Américains nous ont livrée. On peut même dire que c'était une claque magistrale ! Ca me fait quand même halluciner qu'un groupe aussi bon en live, qui a vraiment fait l'unanimité, n'ait pas pu rameuter plus de cent personnes pour les dates de leur tournée européenne qui ont suivi le Keep It True... En tout cas j'espère qu'ils vont pouvoir tourner avec de gros groupes qui ramènent du public parce que là, ils se feront des fans.
C'est ensuite au tour du seul groupe allemand de la journée, ATLANTEAN KODEX, de venir envouter le KIT. Les Allemands soutenant toujours leurs groupes, c'est une grosse ambiance assurée. ça fait quelque temps que je les écoute et c'est devenu l'un de mes groupes d'epicus doomicus metallicus préférés. Il avaient déjà mis le feu au KIT en 2014, comme j'avais pu le constater sur Youtube (ce qui m'avait donné une belle envie d'essayer un jour ce festival, autant que de voir le groupe sur scène). Et puis je les ai enfin vus en live un an plus tard, lors de la première édition du Pyrenean Warriors Open Air. Ils m'avaient mis une belle claque et ils avaient fait l'unanimité. Même sous le soleil méditerranéen, leur musique était magique. Mais là, avec un public à fond derrière eux, c'est tout simplement grandiose. Ca commence sur "Enthroned in clouds and fire", parfait pour se chauffer. Et quand retentit "Sol Invictus", c'est l'orgie ! 2000 personnes reprenant en choeur "Sooool sooool inviiiictus", ça donne des frissons. Idem pour la magnifique "Twelve stars in an azure gown", hymne à Europe (la princesse grecque enlevée par Zeus déguisé en taureau blanc, qui a donné son nom à notre continent) aux mélodies qui donnent le frisson, surtout quand elles sont reprises par une salle entièrement acquise à la cause du groupe. Les chansons ont beau être longues, on a l'impression qu'elles durent à trois minutes chacune tant elles sont excellentes. Le groupe est carré et le chanteur a une voix extraordinaire, avec beaucoup d'émotion et aucune fausse note. A signaler que ce concert du Keep it True 2017 était leur dernier de la tournée "The white goddess", avant que les Bavarois ne rentrent en studio pour un troisième album que j'attends de pied ferme .
Après ces deux tueries, on va lever un peu le pied. LEATHER, qui suit, est le groupe de Leather Leone, chanteuse de Chastain qui vient jouer des chansons de ce dernier (qui ne veut pas tourner) plus quelques titres à elle. Je ne suis pas un grand fan de Chastain. Musicalement, c'est très bon mais je n'aime pas trop la voix de la chanteuse, que je trouve trop criarde. Je regarde la première chanson et je ne suis pas vraiment convaincu, donc à boire !!!
Vient alors le groupe le moins metal de l'affiche avec ASHBURY. Mais ils ont leur place au Keep It True parce qu'ils ont fait un album (magnifique) en 1983, "Endless skies", sorti dans un anonymat relatif, puis un autre en 2004 (que je n'ai jamais écouté) à l'occasion d'une reformation. Et ils ont leur place ici, aussi et surtout, parce que leur musique est bonne bonne bonne. Et ça permet aussi de montrer que true ne veut pas dire sectaire ! C'est clair que ces Américains sont bien plus rock que heavy metal, et bien plus influencé par les 70's que par les 80's. C'est du classic rock avec un petit côté folk très agréable et une touche épique. Leur son me fait beaucoup penser à Uriah Heep (dont l'imagerie a aussi des points communs avec la leur) et Jethro Tull, avec un feeling de malade. Et quand ils débarquent avec leur guitare acoustique sur "The warning", c'est la folie furieuse dans la salle : 90% des gens présents connaissaient les paroles ! Encore un grand moment qui me fait comprendre le côté unique du Keep It True. L'acoustique de la salle est pour une fois favorable à la musique d'Ashbury, où la guitare sèche a une grande importance. Ce concert est tout simplement un voyage épique dans un autre temps
Après cet interlude baba cool qui fait du bien, on repasse à quelque chose de plus purement metallique avec un autre groupe américain, FIFTH ANGEL. Groupe culte de la scène metal US des années 80 n'ayant sorti que deux albums (j'ai l'impression de me répéter quand je présente comme ça un groupe à l'affiche du KIT ), je ne connaissais que de nom jusqu'à ce que j'y jette une oreille un mois avant de monter à Lauda-Königshoffen. Et bien m'en a pris car c'est carrément excellent. Du heavy racé, avec une belle paire de guitaristes qui envoient du steak et un chanteur, Peter Orullian, à la voix parfaite. Ce n'est d'ailleurs pas lui qui chante sur les albums de Fifth Angel, mais son prédécesseur a arrêté la musique. Il faut dire aussi que c'était il y a une trentaine d'années et qu'après tout ce temps, tout le monde n'a pas la même motivation pour reprendre... En tout cas, la motivation, Orullian l'a ! Il n'est pas complètement inconnu puisqu'il avait aussi donné un coup de main il y a une dizaine d'année à Heir Apparent, autre groupe de metal US culte. Et accessoirement, il est aussi écrivain (il compte à son actif une quinzaine de romans de fantasy, non traduits en français). Mais le plus important ici, ce sont ses capacités vocales. Et sa voix est parfaite. Après, le groupe aurait pu venir sans chanteur : le public du KIT l'aurait remplacé ! Là encore, tout le monde est à l'unisson pour reprendre leurs refrains, qui sont irrésistibles (même si, pour y mettre un petit bémol, je trouve que les refrains de Fifth Angel se répètent un peu trop longtemps) et que l'on se met à chanter instinctivement même sans bien connaître. Le groupe est carré, sans une fausse note, les mélodies ne sont pas massacrées par le son (à moins qu'on ait complètement passé outre) bref, le concert est impeccable et jouissif !
On arrive maintenant au dernier acte de cette journée de folie avec le "big epic headliner" : CIRITH UNGOL ! Groupe culte du metal US des année 80, tout ça tout ça, reformés depuis deux ans, c'est la première fois que les Américains se produisent en Europe. Un moment historique, donc ! Ils sont en tout cas attendus de pied ferme, vu le nombre de tee-shirts à l'effigie du groupe. C'est un groupe que je connais depuis pas mal de temps mais avec lequel j'ai eu beaucoup de mal au départ. Leur musique est certes épique mais très peu accessible. Surtout à cause de la voie criarde très particulière de Tim Baker. Au début je détestais. Et puis à force, j'ai fini par apprécier Cirith Ungol, au point d'en attendre beaucoup de leur prestation. Alex, lui, était convaincu que ce groupe faisait de la merde ! Mais il changera d'avis après avoir vu le groupe. Ils vont en effet s'atteler à nous montrer que ce n'est absolument pas le cas. Déjà, en étant devant, on est bien entourés pour pouvoir apprécier un concert : cinq mecs juste derrière nous, fans ultimes de chez ultime de Cirith Ungol, étaient littéralement en transe, chantaient les paroles de la première phrase de chaque couplet à la dernière. Leur enthousiasme était franchement communicatif. Au delà de ça, musicalement, ce groupe est franchement trippant. Leur style assez unique est particulièrement valorisé par le live. C'est épique à souhait, bien mis en avant par le jeu de lumières et un son excellent.
Objectivement, avec ses lunettes rouges et sa coiffure gâchée par la calvitie, Tim Baker ne ressemble à rien... Ou alors à une tentative de clonage d'Elric Mais alors il a un de ces charismes ! Sans oublier sa voix si unique, qu'on adore ou qu'on déteste (moi j'ai d'abord détesté avant d'adorer !) mais qui joue beaucoup dans le fait que Cirith Ungol ait un son si particulier. Du reste, même si on ne passe pas l'obstacle de la voix, c'est quand même un excellent chanteur, qui chante parfaitement juste. A 60 ans, c'est à signaler, même s'il n'a pas fait beaucoup de scène dans sa vie et qu'il a arrêté la musique pendant plus de vingt ans. On se laisse en tout cas captiver par le heavy / doom épique des Californiens et ses ambiances trippantes. Les harmonies de guitares sont magnifiques et les riffs plombés. En plus, c'est très varié, entre des morceaux bien rentre-dedans comme "Blood and iron" et d'autres plus doom tels que "Chaos descends", ou encore des pièces plus longues et épiques à la "King of the dead"... et tout y est bon ! A la basse, on reconnait le chanteur bassiste de Night Demon, qui nous avais mis une belle claque dans l'après-midi. Jarvis Leatherby apporte une jeunesse et une envie communicatives au reste du groupe. Il assure aussi les choeurs de temps à autre. Et le public est en ébullition devant une tête d'affiche qui tiendra toutes ses promesses. C'était une heure et demie particulièrement jouissive que Cirith Ungol nous a offerte. Pour leur première prestation européenne, ils ne se sont absolument pas loupés. Pour le coup, je me sens privilégié d'avoir assisté à cet événement. J'espère qu'il y aura d'autres occasions de les voir.
Ainsi s'achève la deuxième journée du Keep It True (et donc le festival lui-même). Une journée extrêmement riche en lives de qualité. Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas enchaîné les concerts comme ça ! Par contre, on ne s'éternisera pas dehors parce que la température est vraiment glaciale. Du reste, beaucoup de gens sont déjà en train de plier bagage. Visiblement, la grosse ambiance dans le camping du KIT, c'est plutôt le vendredi. En même temps, vu les conditions très roots du camping (nuit glaciale, quelques chiottes chimiques et absence totale de douches), je comprends que les Allemands qui n'ont pas trop de kilomètres à faire préfèrent rentrer chez eux au chaud. Nous, on finira la nuit à l'hôtel tranquillement, à déguster des bières artisanales histoire de se remettre un peu de la bière allemande dégueu, et un metalleux bavarois fan de foot mais anti-Bayern avait du bon whisky à nous faire déguster ! Le retour en France s'effectuera tranquillement le lendemain, avec une halte à Strasbourg pendant la journée avant qu'on prenne l'avion pour Toulouse le soir.
Bilan de ce premier Keep It True : fabuleux ! Malgré le son globalement mauvais, tous les groupes que j'ai vus ont offert de belles prestations, certaines exceptionnelles dans tous les sens du terme, dans une ambiance de folie. Ca faisait vraiment longtemps que je n'avais pas autant enchaîné les concerts. C'est un public de connaisseurs, bien plus ouvert que ce que l'on peut penser. Par contre, il n'y a pas de touristes ! Et le cadre assez petit donne au festival un côté fête de famille vraiment génial. C'est un esprit particulier et il faut vraiment y être pour comprendre. Je n'ai pas pris ma place pour l'année prochaine car, venant avant tout pour découvrir, je n'avais pas la certitude d'être emballé au point de vouloir revenir à l'aveugle vu qu'aucun des groupes annoncés pour 2018 ne me donnait envie de faire un déplacement quand même pas simple quand on vient du sud de la France. Mais une fois les deux jours passés, ça m'a donné des regrets. Peut-être que je réussirai à récupérer un billet l'année prochaine... ou pas. Mais en tout cas si je n'y vais pas, je sais que j'aurai un pincement au coeur tant ces deux jours ont été bons, aussi bien pour la musique que pour les rencontres et retrouvailles entre pote.
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