UN SITE. Le CAFÉ DE LA DANSE est situé au cœur du quartier de Bastille, au 5 Passage Louis-Philippe à Paris dans le 11ième.
C'est un bel auditorium, qui accueille des spectacles, des concerts et des évènements depuis 1992, et qui fonctionne en partenariat avec la Mairie de Paris, la SACEM (Société des Auteurs, Compositeurs et Éditeurs de Musique) et la SCPP (Société Civile des Producteurs Phonographiques). La salle dispose de deux types de configurations : 250 places assises ou 500 places debout/assis.
UNE HISTOIRE. A l'instar de nombreux groupes de l'époque, le pedigree de GONG est compliqué à suivre, mais autant le dire toute de suite ; de la première formation de GONG, il ne reste personne. La survie du concept mérite donc un p'tit historique…
https://gongband.bandcamp.com/
https://www.gongband.com/
Communauté artistique hippie internationale et indéfinissable par excellence, on pourrait toutefois, sans outrager les protagonistes, les situer dans la catégorie du rock progressif, bien que ce cadre semble étroit pour les définir ! GONG est considéré comme l'un des groupes de rock les plus atypiques, novateurs et expérimentaux des années 70, en exprimant un mélange expérimental de space-rock, de jazz et de psychédélisme, avec des éléments de mysticisme et de surréalisme…
Daevid Allen, musicien australien, grand facteur de la fantaisie et de l'irrationnel, avait d'abord animé le DAEVID ALLEN TRIO en 1963 (formé de Hugh Hopper à la basse et Robert Wyatt à la batterie). Puis il mena SOFT MACHINE en 1966. Mais en 1967 ou en 68 (selon les sources confuses) il se fait refouler à la frontière anglaise après une tournée française. Le musicien australien n'a pas eu l'autorisation de regagner le Royaume-Uni, son visa ayant expiré ! Cet exil forcé en France, le contraint à s'installer à Paris. C'est à cette époque qu'il fonde GONG, en 1969 ; Il y avait alors Daevid Allen (chant, guitare), Gilli Smyth (chant, chœurs) et Didier Malherbe (flûte, saxophone) auquel s'ajoutait le batteur éphémère Rachid Houari, en 1969. Le guitariste Steve Hillage rejoindra la formation à géométrie variable, en 1972.
Le premier album, "Magick Brother", enregistré avec des musiciens de passage, se caractérise par un audacieux son pop psychédélique. Mais c'est en 1971, que parait l'emblématique album "Camembert électrique", qui va définir l'entité GONG par un son plus rock psychédélique/space-rock auquel il sera souvent associé par la suite. Gong a enchaîné d'autres albums restés célèbres comme "Flying Teapot" (1973), "Angel's Egg" (1973) et "You" (1974), qui constituent la fameuse trilogie Radio Gnome Invisible du groupe, qui relate les aventures facétieuses de Zero the Hero.
Je renonce à détailler les suites polycéphales, qui se sont nommées alternativement au gré des repreneurs ; Pierre Moerlen's Gong, Mother Gong, Planet Gong, New York Gong et Gongmaison. Bref, après un parcours farfelu, confus et nappé de parfums exotiques, en 1990 Daevid Allen reprend GONG, qu'il aura mené jusqu'à son décès d'un cancer, le 13 mars 2015.
C'est là où la formation actuelle débute, en fait ! Allen a incité ses acolytes à continuer l'aventure de GONG, sans lui. Le collectif accepte et décide donc de continuer conformément à ses vœux. Le nouveau GONG embauche Kavus Torabi (Guapo, Cardiacs) qui les avait déjà accompagnés en tournée comme guitariste les années précédentes. Le groupe se révèle ainsi à la fois dynamique, méditatif, puissant et explosif ; leur musique s’inspire du credo du GONG original tout en restant déterminé à entretenir une saine créativité, sans s’embarrasser de la nostalgie excessive : "Rejoice, I'm dead, At last I'm free!"…
C'est ainsi que débute leur période la plus stable finalement, depuis huit années ; nous retrouvons ce soir Fabio Golfetti (guitare, depuis 2012), Ian East (flûte, saxophone, depuis 2012), Dave Sturt (basse, depuis 2012), Cheb Nettles (batterie, depuis 2016), et donc Kavus Torabi (chant, guitare depuis 2016).
C'est cette formation qu'avec ma P'tite Fée nous sommes allés voir en concert en Ecosse, au Summerhall d'Édimbourg, le 23 mars 2024. (mon récit, ici) Cette soirée-là, qui s'inscrivait dans le cadre d'une tournée britannique commune avec OZRIC TENTACLES, était déjà l'occasion de promouvoir leur récent opus "Unending Ascending" paru le 3 novembre 2023. (D'ailleurs, une nouvelle édition spéciale de cet album parue ce 20 septembre 2024, comprend désormais un livret (huit pages), et surtout six titres bonus inédits enregistrés précisément lors de ce concert en 2024. Je ferai l'effort de ne pas le racheter.). Ils viennent à Paris dans le cadre de leur tournée européenne "Universal Ascension 24", qui comprend vingt-six dates, entre le 7 novembre et le 9 décembre.
Ouverture des portes 19h30. Avec mon fils ainé et ma P'tite Fée nous nous plaçons en fosse, non loin du bord de la scène.
UN CONCERT [20h15-20h50/21h10-22h25].
Cet auditorium étant doté d'une acoustique excellente, il revenait à l'ingénieur du son de garantir la bonne transmission. La sonorisation nous a paru parfaite ; tous les pupitres furent audibles, même si la batterie m'a semblé un peu trop exposée. Un éclairage très bien dosé selon les atmosphères ont permis de bien observer les interventions ; même si la Musique incite souvent l'auditeur à méditer en fermant les yeux ! Un vaste écran mural diffuse les images délicieusement psychédéliques. Le quintuor dispose d'une large scène, mais c'est le charismatique Kavus Torabi qui s'y déplace le plus !
Au risque de paraitre comme un rédacteur fainéant (mais je suis sûr que les connaisseurs me comprennent), un concert de GONG, sans doute davantage que celui de tout autre groupe d'artistes, se vit davantage qu'il ne se raconte. Il invite son public à un voyage cosmique, intemporel. Pour embarquer dans le vaisseau, il est essentiel d'ouvrir ses chakras et de se laisser porter par les sonorités hallucinatoires. On peut soit clore les paupières pour favoriser la captation sonore, soit ouvrir grand les yeux pour pénétrer l'univers visuel baigné par un spectacle de lumière kaléidoscopique inoubliable, diffusé opportunément par Fruit Salad Lights.
L'acte I nous a surpris par sa durée inhabituellement courte, alors que nous commencions tout juste à élever nos esprits, notamment après "Rejoice !" enivrant ! Mais c'était en fait pour mieux rebondir vers un espace intersidéral, contrairement à ce que laisserait entendre le titre de reprise "Tiny Galaxies" ! GONG nous aura bien hypnotisés durant deux heures intenses et extatiques.
Sur notre gauche, Ian East alterne son saxophone soprano et son saxophone ténor en si♭, pour pimenter d'un côté jazzy les errances cosmiques exprimées par le quintet. A son côté, le très charismatique Kavus Torabi, souriant et exubérant, les yeux souvent exorbités, s'éclate sur scène avec un plaisir communicatif ! Dave Sturt, plus discret mais tellement efficace, entraine l'ensemble en alternant des ostinatos ensorcelants et des subtils accords vrombissants. Quant à Fabio Golfetti, il honore la mémoire Daevid ALLEN, notamment en perpétuant son art d'extraire les sons "en glissando", en frottant une tige métallique. Efficace et puissant, Cheb Nettles garantit toutes les subtilités rythmiques exigées par ces compositions excentriques.
Le summum aura été l'enchaînement de "Ship of Ishtar" avec l'emblématique "Master Builder" dont on ne se lasse pas. Ce titre est précédé d'une longue phase introductive et introspective jouée, dans la pénombre bleutée, par les guitaristes qui font vibrer les cordes avec leur tige de manière à évoquer les méditations tibétaines. Pour peu que l'auditeur consente à suivre ce mouvement préalable, il aborde alors "Master Builder" dans un état de transe inouïe en marmonnant le "IAO ZA-I ZA-O, MA-I MA-O, TA-I TA-O NOW". Les pieds ne touchent plus le sol. Ce transport extrasensoriel imparable se renouvelle, à l'instar de nos expériences déjà vécue avec Steve Hillage lors du festival de Loreley le 21 juillet 2019, ainsi qu'à Edinburg le 23 mars dernier !
Comme pour nous maintenir en apesanteur, GONG nous assène "Insert Yr Own Prophecy", puis "You Can't Kill Me". Ce dernier titre évoquant la toute première époque du groupe légendaire.
Kavus Torabi, soulignant que GONG n'était pas revenu dans Paris depuis dix années (en effet, la dernière remontait au 15 octobre 2014 au Trabendo), prétend qu'un retour est escompté sous peu, ce dont le public prend acte avec un enthousiasme bruyant. Cette réponse semble avoir convaincu les musiciens ; nous verrons bien …
Avec douze titres, cinq albums sont évoqués : cinq titres issus de "Unending Ascending" (2023), quatre de "Rejoice ! I’m Dead !" (2016), un de "Camembert électrique" (1971), un de "The Universe Also Collapses" (2019), et un de "You" (1974).
PROGRAMME
ACTE 1:
- My Guitar Is a Spaceship (Unending Ascending, 2023)
- Kapital (Rejoice ! I’m Dead !, 2016)
- All Clocks Reset (Unending Ascending, 2023)
- Rejoice! (Rejoice! I’m Dead !, 2016)
- Choose Your Goddess (Unending Ascending, 2023)
ACTE 2:
- Tiny Galaxies (Unending Ascending, 2023)
- My Sawtooth Wake (The Universe Also Collapses, 2019)
- Through Restless Seas I Come (Rejoice ! I’m Dead !, 2016)
- Ship of Ishtar (Unending Ascending, 2023)
- Master Builder (You, 1974).
RAPPEL :
- Insert Yr Own Prophecy (Rejoice ! I’m Dead !, 2016).
RAPPEL :
- You Can't Kill Me (Camembert électrique, 1971).
On ne sort pas indemne d'un tel voyage. Le bonheur se lit sur les visages des auditeurs. Un choix restreint dans les tailles de t-shirt nous permet de demeurer raisonnables. Une petite halte désaltérante dans un bar de la Bastille nous remettra les idées en place, pour un atterrissage en douceur ! IAO ZA-I ZA-O, MA-I MA-O, TA-I TA-O NOW…
PATRICE DU HOUBLON Plus d'infos à propos de l'auteur ici |
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