Comment exprimer un sentiment d’absolue et voluptueuse majesté à propos d’une œuvre musicale dont on a peine à se délivrer ? Comment décrire les harmonies qui ont mis en place ces liens ? Comment retranscrire cet intense et presque magique ressenti ?
Voilà les questions qui se posent à moi au moment de tenter de décrire un album qui m’a tout simplement mis en vrac, alors que je ne m’y attendais pas…
ENEFERENS. Voilà un nom de groupe plutôt déstabilisant et pour le moins peu accrocheur. Encore plus étonnant est son line-up puisqu’il s’agit d’un one-man-band, c’est-à-dire Jori Apedaile from Minneapolis, Minnesota, USA, tout seul au chant, aux instruments, aux compositions, et également au packaging et artwork de la pochette. Ouf !
Troisième LP d’ENEFERENS, "The Bleakness of our Constant " est de ces rares albums qui arrive à faire une synthèse brillante unique d’influences multiples. Un condensé de death, folk, pagan, doom, prog –rock qui propulse un black metal basique dans les hautes sphères d’un rock progressif que certains qualifient d’atmosphérique en raison de sa propension à faire planer ses mélodies…Débutant par un instrumental sombre et mélancolique ("Leave"), l’album explose dans un rugissement thrash et malsain sur "This onward reach" tel une éruption volcanique détruisant la calme ambiance mise en place par le premier titre. Ce déferlement heavy est conforté par un chant oscillant entre parties claires et mugissements bestiaux. Vient ensuite l'immense "Amethyst" qui reste également dans des contrées musicales black avec un chant furieusement guttural, sans hurlement, juste un susurrement sombre, survolé par des boucles de guitares et un riff magistral, entêtant, avant un break donnant dans le folk-rock, orientant le titre vers des horizons lointains, à la fraîcheur scandinave à peine voilée. Gratte sèche, reprise électrifiée du riff en montée progressive et arrivée du chant clair à la dimension toute empreinte de douceur et de pureté. Le morceau plonge alors dans un abyssal prog-rock voluptueux lui même brisé en son sein par une guitare folk légère, avant que le rythme ne s'accélère à nouveau en dernière partie de titre. Exceptionnel morceau de bravoure de plus de 7 minutes. Epoustouflant!
Après ce titre tutoyant des sommets de créativité, vient une petite ballade calme et douce: "Awake". Le chant y est tranquille. Les accords de guitare sont simples et parfaitement exécutés. La rythmique est très en retrait. Il s'agit d'un intermède reposant avant que les notes de "Weight of the mind's periapt" ne se fassent entendre pour un titre qui va s'étirer langoureusement sur presque 9 minutes d'une sorte de doom-metal épique. Là encore, et malgré le tempo beaucoup plus lent, Jori Apedaile fait montre d'une maîtrise totale de sa composition qu'il va édulcorer progressivement d'un chant clair et terminer en parfaite harmonie comme une sorte de sermon pour un parterre d'auditeurs asservis et totalement soumis à leur maître.
Si l'instrumental "11:34" qui vient ensuite semble placé là lui aussi pour permettre aux adeptes de se remettre après tant d'émotions, l'album va se refermer sur une pièce maîtresse frôlant les 9 minutes: "Selene". Sur ce dernier morceau également toute une palette d'ambiances rock va savamment être utilisée afin d'entraîner l'auditeur vers un splendide et monumental black-metal atmosphérique clôturant avec emphase et un petit brin de malice une oeuvre bouleversante et en tous points réussie. Un coup de maître.
"The bleakness of our Constant" : un des albums de l'année.
Tracklist :
1 Leave
2.This Onward Reach
3.Amethyst
4.Awake
5.Weight of the Mind’s Periapt
6.11:34
7.Selene.
Line Up :
Jori Apedaile Chant, Tous les instruments
Label : Nordvis Produktion
Sortie : 26/10/2018
Discographie :
The Inward Cold 2016
In the Hours Beneath 2016
The Bleakness of Our Constant 2018
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