Merci pour ce point de vue largement argumenté !
Faut il signer ou pas signer ? De mon côté, j'ai signé et je suis beaucoup plus proche de ton ressenti que celui de C Lamet, dont j'ai mis la missive ci dessous, pour ceux qui ne sont pas sur FB, n'hésitez pas à donner vous aussi votre point de vue !
In fine on peut ne pas être d'accord avec ce mouvement, on est en démocratie, mais je crois que c'est perte de temps que d'essayer de culpabiliser ceux qui le soutiennent, la cause est là, évidente, et il y a là indiscutablement un élan de solidarité très fort, animé par des jeunes plein d'enthousiasme, dont Alison Couteau.
Voici la l'article de C Lamet en date du 26 juillet, sur son compte FB :
Pourquoi je ne signerai pas la pétition...26 juillet 2013, 18:09
Avant-propos...
Pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis journaliste et réalisateur pour la télévision. J'ai été fondateur et rédacteur en chef d'une des publications qui a le plus marqué la presse metal française, HARD FORCE MAGAZINE. Depuis mon enfance, j'écoute du hard rock, aujourd'hui rebaptisé metal. Depuis l'âge de 16 ans, il y a trente et un ans, je participe à toutes les formes de reconnaissance et de promotion de cette musique à travers les médias. D'abord en radio, puis en presse, aujourd'hui sur le web avec HARD FORCE, en télévision avec METALXS et sur les réseaux sociaux. A ce titre, il me semble avoir "mon mot à dire" (et même un peu plus), d'abord parce que nombreux me l'ont demandé, et puis parce que je collabore aussi à cette télévision que tout le monde critique mais que tout le monde regarde. C'est bien de connaître les deux versants du décor.
Tellement de gens donnent leur avis sur tout sans savoir.
Les "faits"...
Depuis quelques jours, une grande partie de la communauté metal s'émeut suite à la diffusion d'un reportage dans l'émission "Zone interdite" sur M6, mercredi 24 juillet 2013.
Dans "Invasion de touristes : quand les habitants se révoltent !", il est démontré le principe du localisme et notamment le refus d'habitants de supporter l'invasion régulière de touristes dans leur région, cause de nuisances et de dégradations.
Comme à son habitude, le magazine est découpé en séquences.
Où l'on découvre dans l'une d'entre elles que le Hellfest, que chacun connaît bien ici, s'inscrit dans ce cas de figure...
Initiative spontanée, dans les heures qui ont suivi, celle d'Alison C. d'engager une pétition afin que la chaîne s'excuse publiquement, je cite, "pour les propos diffamatoires tenus à propos du Hellfest".
Pour ceux qui ne l'ont pas encore lue, voici le lien :
https://www.change.org/fr/pétitions/m6-excuses-publiques-pour-les-propos-diffamatoires-dans-zone-interdite-à-propos-du-hellfest
Depuis, je suis assailli de messages privés qui me demandent de signer la pétition pour faire corps avec la grande famille metal.
A l'heure où j'écris, elle a recueilli près de 26 000 signatures virtuelles en 24 heures.
Et depuis avant-hier, bien que totalement affligé par ce que j'ai pu voir dans le reportage, j'observe vos réactions, je lis vos commentaires et je sais... pourquoi je ne signerai pas cette pétition.
La cause ! Quelle cause ?
D'abord, parce qu'il y a plus important dans la vie que cette mobilisation. L'actualité nous donne chaque jour des causes plus grandes, des raisons plus humanistes ou altruistes de nous révolter.
Il y a des gens qui meurent, des conflits qui s'enlisent dans le monde, des menaces terroristes, des otages, des scandales économiques et financiers, la mondialisation, des zones de non-droit intolérables dans notre pays, des maladies encore incurables, des incivilités omniprésentes au quotidien, du chômage, l'environnement qui se meurt, un pays qui se déchire politiquement, des hommes et des femmes humiliés ou emprisonnés dans des sociétés médiévales, des gens qui vivent sous le seuil de pauvreté ou dans la rue, la moitié de la France qui ne part pas en vacances…
Autant de sujets pour lesquels ceux qui ont d'ores et déjà signé la pétition contre les propos de M6 à l'encontre du Hellfest n'ont probablement jamais actionné le moindre clic de souris ou refusent même de se prononcer.
Sous cet angle, on relativise drôlement l'importance de ces quelques minutes de "télévision" et on évite de parler de "cruauté" envers les amateurs de metal.
L'usage de la pétition - en général - ne peut être galvaudé.
Celle qui est proposée ici ne porte aucun projet, ne vient en aide à personne, ne sauve rien.
Elle voudrait juste laver l'honneur du Hellfest et, à travers le festival, celui des "metalleux".
L'hôpital qui se fout de la charité...
"Propos diffamatoires à l'égard du Hellfest".
L'objet même de cette pétition fait sourire.
Aujourd'hui, l'amateur de metal, blessé par une image négative et des mensonges colportés par un média d'envergure, voudrait donner des leçons de bienséance au journalisme - et quand bien même au journalisme version M6 - alors que le metal, la musique qu'il vénère au quotidien, transgresse toutes les règles (politique, moeurs, religion, société) dans ses textes et provoque par son attitude depuis des décennies ?
Est-on bien sérieux ?
Tendre le bâton pour se faire battre...
La pétition cite quelques adjectifs piochés dans le commentaire du reportage : "Drogués, alcooliques, irrespectueux, voleurs, sales, satanistes" mais qui concernent les festivaliers, pas le festival lui-même. L'intitulé de la pétition ne fait pas la nuance. Dommage.
Il ne doit pas y avoir dans cette concentration d'un week-end plus de drogués, de voleurs et de gens sales qu'ailleurs dans la société toute l'année, mais tout ceci fait partie du fantasme alimenté par la posture même de l'amateur de metal.
Mais, entre nous...
* Vous ne voulez pas qu'on vous montre bourrés ? Ne buvez pas avec excès !
* Vous ne voulez pas qu'on vous montre agressifs et menaçants ? Ne beuglez pas si vous voyez une caméra.
* Vous ne voulez pas qu'on vous prenne pour des fantaisistes exaltés ?
Ne venez pas déguisés. Ne montrez pas vos fesses au Petit Journal.
* Vous ne voulez pas qu'on vous prenne - à tort puisque (dixit) "ce n'est que de la musique" - pour des satanistes ?
Ne portez pas de signes ostentatoires, par mode ou par conviction, de votre passion pour l'occulte.
* Vous ne voulez pas qu'on vous montre... tout court. Exigez votre droit à l'image !
Sinon, assumez !
Le Hellfest c'est la deuxième manifestation musicale de France.
Forcément, ça intrigue, ça attire bien plus les mouches avides d'images croustillantes, décalées et marginales, que les virées familiales aux Francofolies.
Le metal et sa population offrent tout le folklore dont les journalistes sans aucun sens du second degré et à la recherche de sensationnel vont se repaître.
Cette panoplie qui fera toujours trembler les pauvres gens.
Et par les temps qui courent, le fond de commerce, c'est l'anxiogène, les gens tremblent facilement.
La reconnaissance du metal ? Mais quelle reconnaissance ? Et par qui ?
C'est tout le paradoxe de l'amateur de metal.
Se sentir bien en confrérie, entre soi, en marge, mais vouloir être reconnu par les médias !
Provoquer sans limite mais qu'on ne porte pas atteinte à sa respectabilité !
Réclamer toujours et sans cesse une estime du grand public en restant extrême et s'étonner de l'image négative perçue par ceux qui n'y connaissent rien.
Une pétition qui donne de l'importance à un tissu d'âneries...
Il va sans dire que le reportage proposé par "Zone Interdite" est une succession surréaliste de séquences pauvres et affligeantes.
Cette pétition donne donc de l'importance à ce qui est déjà une honte pour la profession de journaliste.
L'exaspération d'une poignée de deux-trois riverains, l'une résignée à fuir l'invasion des hordes barbares pour protéger chien et enfant le temps du week-end, un autre, procédurier, qui ne trouve aucun soutien des forces locales (résignées ? Corrompues, bah, forcément ! Le reportage laisse planer le doute sur ces gendarmes en caméra cachée) ou cherche toutes les jurisprudences de la justice française pour faire plier l'élu local sur le thème de la nuisance sonore.
Le bruit... et pourquoi pas l'odeur ?
Presque...
Le metalleux fait bien ses déjections dans les vignes.
Tous les metalleux font ça, c'est bien connu.
Ahhhh, le microscope de la télé-sensation qui part de l'anecdote et en fait une généralité, un thème "concernant" de société.
Regardez cette réunion en mairie de riverains mécontents. On s'attend à un lobby écrasant.
Allez, ils sont 20 à tout casser...
Vous voulez dire que ça, c'est un pouvoir qui peut faire fléchir le Hellfest ?
Le reportage se perd lui-même en donnant la parole à quelques excités ou illuminés (le street power des distributeurs de flyers qui essayent d'évangéliser les places de marché), sans compter ce témoignage saisissant de cette experte en rien du tout qui vous parle du procédé révolutionnaire de diffusion du son et des basses sous le sol.
Ri-di-cu-le !
Parle-t-on des retombées économiques formidables du Hellfest pour contrebalancer les arguments aussi partisans que foireux ?
A demi-mot. Lorsqu'il est question de Muscadet.
Non sans équivoque...
J'dis ça j'dis rien, j'vous glisse dans le commentaire avec cette pointe d'ironie, ben, que le Muscadet, c'est d'la piquette et qu'il croupirait en tonneau s'il n'y avait pas le p'tit coup d'pouce du Hellfest. C'est pour ça que les élus locaux ferment les yeux. Mais j'ai rien dit, hein ?
Et d'interviewer Ben Barbaud, bien gentil d'avoir accepté la présence de la caméra de M6...
Il lance un chiffre impressionnant de plusieurs millions d'euros de manne économique pour la région (hébergement, consommation, restauration) que le commentateur se gardera bien de reprendre, car il ne sert pas le propos. Il faut démontrer que le Hellfest, c'est MAL !
Il faut que la France ait peur, peur du bruit, peur d'être dérangée quatre jours, peur de l'agression visuelle de ce spectacle navrant.
[D'ailleurs, Ben, je serais bien curieux de savoir ce que M6 t'a présenté comme thème de reportage lorsque tu leur as accordé ces quelques minutes. Parce qu'un sujet comme celui-ci ne s'improvise pas sur place. En tournage, je suis bien placé pour le savoir, on part avec une intention de réalisation, on contacte des personnes, on demande des autorisations, on s'assure d'avoir suffisamment de séquences. Je doute que le titre "Invasion de touristes : quand les habitants se révoltent !" ait suscité ton adhésion et que tu leur aies ouvert grandes tes portes (de l'enfer) dans la perspective de te faire critiquer un mois plus tard.]
M6 a franchi la zone interdite du journalisme, celle du reportage cheap, du sujet non étayé, parti-pris du nivellement par le bas et cliché à chaque plan.
Du popu-journa-lisme pour l'audience.
M6 a la mémoire courte de son action pour le metal : elle se targuait d'avoir révélé un incroyable talent en BLACK RAIN en fin d'année dernière ; elle fut la dernière chaîne qu'on appelait autrefois hertzienne à avoir, mais c'était il y a 20 ans, consacré une case de ses programmes au metal (souvenez-vous Metal Express) et avoir été partenaire d'une sacrée ribambelle de concerts de metal pendant de nombreuses années.
Et ensuite ?
Mais voilà, une fois qu'on a vu le reportage, constaté ça, on a tout dit.
Un sujet fait par des gens qui n'y connaissent rien, sans objectivité ni déontologie, qui servent un parti-pris sur des faits biaisés dès le départ.
Demander des excuses publiques de la part de M6 ?
Et si cela se produisait... même pour le principe.
Pour quoi faire ?
Quel rétablissement de la vérité ?
Quel aboutissement pour le metal ?
Quel élan fédérateur ? Au profit... de quoi ?
La seule pétition valable...
Le Hellfest a-t-il besoin d'être sauvé ? De quel péril ? De quel agresseur ?
De quatre riverains mécontents grossis à la loupe de la télé-voyeuriste qui s'exhibent en prime-time et passent, finalement, pour des gens bien... "braves" ?
La meilleure pétition qui soit, c'est assurer la fréquentation annuelle du festival d'année en année.
En démontrant que le style mobilise et que l'événement se déroule sans heurts. C'est bien ça qui dérange : à Clisson, on ne caillasse pas, on n'insulte pas la maréchaussée, on ne dégrade pas.
La meilleure pétition qui soit, c'est d'être derrière les médias spécialisés metal, presse-télé-radio-web, en les soutenant vraiment, toute l'année, et pas occasionnellement.
Ce sont eux qui oeuvrent en France depuis 30 ans pour que le genre ne soit pas éphémère, pour informer, pour l'installer dans la durée auprès du public et au-delà des modes.
Il aura fallu plus de 10 ans pour qu'en France, il y ait de nouveau une émission de metal à la télé.
A ce jour, après des dizaines de METALXS diffusés depuis décembre dernier, en France et à l'étranger, la page Facebook de cette émission ne compte que... 2000 fans.
Quand on pense à tous ceux qui pétitionnaient, dans le sillage de Patrick Roy, pour que cette émission existe !
Pas au courant ? Pas mobilisés ? Etonnant ! C'est pour le metal ! Signez !
Aujourd'hui, une chaîne, L'ENÔRME TV, consacre une soirée entière, chaque semaine, au metal.
A peine 10 000 fans Facebook sur la page FB.
Pas au courant ? Pas mobilisés ? Etonnant ! C'est pour le metal ! Signez !
Il aura fallu deux ans pour que HARD FORCE, 365 jours par an de travail acharné, qui apporte quotidiennement news metal nationales et internationales, dates de concerts et une quantité d'interviews exclu recueille 13 000 fans sur Facebook.
Pas au courant ? Pas mobilisés ? Etonnant ! C'est pour le metal ! Signez !
Il existe des magazines, des groupes, des radios, des concerts...
Pas au courant ? Pas mobilisés ? Etonnant ! C'est pour le metal ! Signez !
Une journée de pétition pour recueillir 25 000 signatures. Bravo !
Mais personnellement, je préfère agir et entreprendre au quotidien pour cette musique, travailler en parfaite harmonie avec tous les acteurs de la profession que poser ma signature au milieu de dizaines de milliers d'autres dans l'émotion éphémère suscitée par un reportage bas de gamme.
Quelques minutes de télé-kleenex tout au plus. Du jetable. Oubliées à la rentrée.