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Collaborant avec Rock & Folk, Best et Extra, comme photographe  puis comme journaliste,
Bruno Ducourant a immortalisé sur pellicule nombre de légendes de la scène Rock anglo-saxonne des 70's. De Led Zeppelin à Mick Jagger en passant par les Who, Joe Cocker, Tina Turner, John Mayall ou encore Pink Floyd pour n'en citer que quelques-uns, il a contribué à figer quelques instants d'éternité musicale.
Il sort aujourd'hui un livre de photos inédites et d'anecdotes, disponible uniquement en série limitée jusqu'au 25 Juillet prochain à l'adresse suivante : http://fr.ulule.com/my-generation/
ENTRETIEN EXCLUSIF


Bruno Ducourant, merci de nous recevoir pour le lancement de ton livre de photos exclusives consacré à la scène Rock anglo-saxonne du début des seventies. Une question me vient immédiatement: avais-tu oui ou non conscience à cette époque d'être le témoin privilégié d'une période qui allait devenir mythique ?
Oui et non. Non parce que porté par le truc on ne réfléchit pas, surtout à dix-huit ans, on n'a tout simplement pas le recul qui pourrait faire qu'on se pose la question: "Est-ce que je ne serais pas en train d'assister à un évènement qui trente ans après continuera à intéresser des garçons et des filles du même âge..?". En revanche, je me suis fait cette réflexion récemment en écoutant Jimmy Page de Led Zeppelin présenter à l'Olympia le travail de réédition des trois premiers albums, notamment ce qui avait été enregistré dans cette même salle en 1969. Je me suis senti comme dans "Retour vers le Futur"… comme propulsé à l'époque et c'est vrai qu'alors, pour les premiers concerts de Led Zeppelin, j'ai quand même eu l'impression d'assister à quelque chose de pas ordinaire. Quelque chose que je n'avais jamais entendu auparavant. En même temps je me disais que je ne devrais pas être le seul à qui ça allait plaire...
Moi, j'avais suivi Jimmy Page avec les Yardbirds, comme Eric Clapton ou Jeff Beck, mais là tout d'un coup la réunion avec Robert Plant, John Bonham et John Paul Jones annonçait quelque chose de vraiment majeur. Sans être en capacité de mesurer à quel point "ce groupe-là" allait changer la donne, il y avait comme une espèce d'intuition... L'impression d'avoir la chance d'assister à un évènement qu'on a envie et hâte de faire partager à tout le monde. Comme j'écrivais déjà dans la presse rock, c'est ce que j'ai fait, en plus des photos. Donc "conscient d'être un témoin privilégié", oui (d'autant que la photo donne l'impression d'avoir été prise pendant une répétition), au point de prévoir l'énormité de l'impact, non.

 

Revenons sur la naissance de ta vocation pour l'image et ta passion de la musique. Il écoutait quoi Bruno Ducourant encore adolescent ?
Il écoutait déjà les Rolling Stones bien entendu, il écoutait du blues, de préférence de Chicago et… John Mayall... Il faut le redire, en 1968 il n'y a pas d'ordinateurs, pas d'internet, pas de téléphone portable bien entendu et juste trois-quatre stations de radio qui se battent en duel, même pas en FM ! On écoute donc tout ça sur des vinyles qui, la plupart du temps, ne sont même pas encore pressés en France et qui viennent d'Angleterre ou des USA. Ce n'est d'ailleurs pas de la tarte de trouver un disque de quelqu'un qu'on aime bien (et encore j'étais proche de Paris). À cette époque, très peu de ces groupes passent pas à la télévision (qui ne compte que trois chaînes, en noir et blanc). Il va falloir attendre un peu pour que quelques rares émissions le proposent. Avec quelques allumés comme Albert Raisner (de 1961 à 1965, qui présentait Âge Tendre et Tête de Bois, mais qui programmait essentiellement des artistes bien français), Michel Lancelot à Europe N°1 (de 1968 à 1972, avec Campus), Pierre Lattès (avec Bouton Rouge, en 1967), puis Pop 2 (de 70 à 73) avec Patrice Blanc-Francard, Chorus (avec Antoine de Caunes, de 78 à 81), et bien plus tard, en 1983, Les Enfants du rock sur Antenne 2 avec Lescure et Blanc-Francard.
Les anglo-saxons ne se produisant pas dans des émissions de grande écoute, je les ai donc découverts grâce à un "copain de copain" qui avait ramené des disques de Londres. J'ai peu à peu fait connaissance de tous les bluesmen noirs dont ces gars-là s'étaient eux-mêmes inspirés : à savoir le catalogue Chess (Muddy Waters, Willie Dixon, Sonny Boy Williamson, Champion Jack Dupree pour ne citer qu'eux). Ensuite il y a eu le label Blue Horizon créé par Mike Vernon sur lequel allait enregistrer toute la crème du blues anglais, à commencer par Fleetwood Mac.
J'écoutais très peu, mea culpa, les chanteurs français dits "yé-yé"…

La scène musicale française de la fin des années 60 devait sembler bien fade comparée au bouillonnement incessant de son homologue anglo-saxonne ?
Oui, d'autant que j'ai vite compris qu'il s'agissait de copies puisque la majeure partie de ce qui était chanté en français provenait d'adaptations de titres anglais ou américains. Quand j'ai découvert que "J'entends Siffler le Train", "Hey Joe" et autres "Black is Black" avaient un original, la plupart du temps j'ai constaté que l'original était meilleur. Les paroles n'étaient pas forcément plus intéressantes mais même phonétiquement ça "sonnait" mieux.

Premier souvenir de concert à Londres ?
J'avais 17 ans lorsque j'ai assisté au concert de Fleetwood Mac le 6 Juillet 1968, où j'ai rencontré Dominique Tarlé. (ndlr : qui allait devenir l'un des photographes fétiches des Rolling Stones, particulièrement lors de l'aventure d'Exile en France)

Comment est née en toi cette envie d'immortaliser sur pellicule les concerts auxquels tu assistais ?
D'un côté j'allais passer mon Bac, de l'autre je m'intéressais à la musique et à la photo. J'ai donc eu l'idée de faire des photos de ceux qui jouaient la musique que j'aimais. Je suis allé à Londres puisque c'était là que tout se passait et j'ai appris "sur le tas" à faire des photos de concerts.
Par ailleurs, comme je faisais des études dites "littéraires", après un Bac L, j'ai assez vite associé à la saisie de l'image la restitution des impressions procurées pendant les concerts. Lorsque j'ai rapporté mes premières photos de Joe Cocker, on m'a dit "C'est bien mais c'est qui ?". Là, j'ai senti qu'il y avait une opportunité. J'ai expliqué que c'était un plombier de Sheffield qui chantait une chanson des Beatles qui s'appelait "With A Little Help From My Friends" de façon complètement dingue, à la manière d'un pantin désarticulé. Cocker était alors encore à peu près sobre, ou tout au moins c'était encore raisonnable.
J'ai donc commencé à écrire parallèlement aux photos, pour intervertir beaucoup plus tard en arrêtant de faire des photos, parce que je trouvais qu'un crayon et un papier c'était plus léger à transporter. J'ai donc rencontré beaucoup d'artistes que je n'ai pas photographiés mais avec lesquels j'ai simplement "parlé"... Elton John, Marc Bolan, David Bowie... des personnalités avec lesquelles j'ai passé du temps mais sans sortir d'appareil photo (et encore moins un smartphone, ceux-ci n'existant pas encore).

 

Et comment passe-t-on du statut de jeune photographe amateur à celui de journaliste pour Rock & Folk, Extra ou encore Best ?
Je lisais Rock & Folk depuis le premier numéro, qui n'était autre qu'un numéro spécial de la revue Jazz Hot et qui avait été créé par quatre férus de jazz (Robert Baudelet, Philippe Kœchlin et Jean Tronchot et Jean-Pierre Leloir, photographe). Le numéro spécial a tellement bien marché qu'il y a eu un numéro deux et qu'aujourd'hui Rock & Folk existe toujours avec Philippe Manœuvre comme Rédacteur en Chef. Si je me souviens bien la première photo que j'y ai vendue était une photo de Fleetwood Mac, fin 68.
À Rock & Folk j'ai rencontré Jean-Louis Rancurel, un photographe indépendant, qui m'a conseillé d'aller à Best. Par la suite, j'ai rejoint des évadés de Best qui avaient créé un magazine intitulé Extra où je suis devenu secrétaire de rédaction. J'y ai appris à concevoir un magazine et à élaborer la maquette tout en continuant à écrire et à faire des photos. Les DRH n'existaient pas encore et c'était au feeling que les choses se faisaient.

Dans ton livre à paraitre prochainement "My Generation, Only Rock and Roll ?", il se dégage souvent de certaines photos une sensation d'extrême proximité ? À quoi le doit-on ?
Tout simplement en ayant parfois la possibilité d'être "aussi" sur scène ! Il faut savoir que nous n'étions pas si nombreux à faire des photos. Le stratagème consistait à se fondre dans le paysage. À se caméléoniser. Aujourd'hui, à priori, tout le monde a un smartphone et "peut" faire des photos. La donne a changé. J'appartiens à une race qui a disparu puisqu'elle ne sert plus à rien. Tout le monde est devenu photographe, même les musiciens. Il y a les selfies, il y a les tweets. Tout le mystère qui existait alors et qui faisait ce côté un peu charismatique des artistes a disparu puisque c'est le règne de l'info immédiate d'un bout à l'autre de la planète...
J'ai retrouvé récemment des photos faites en 6x6, à l'Hasselblad, au 80mm (ce qui correspond à un 50mm en 24x36), et le sujet remplit le cadre ! Il est effectivement si proche que je peux quasiment le toucher ! Il n'y a pas une brute de 225 kg qui va me demander pourquoi je suis là avant de me traîner dehors. Il y avait la possibilité d'être sur scène mais aussi en coulisses...
J'ai des photos de John Mayall, de Led Zeppelin et de Memphis Slim prises dans leur loge. À l'époque il suffisait de pousser la porte et d'être poli. Nous avions de surcroît à peu près le même âge. On ne nous demandait pas de montrer patte blanche à chaque coin de couloir comme aujourd'hui. Il suffisait parfois de sortir le dernier numéro du magazine en disant "Voilà, c'est le journal pour lequel je travaille". Ils le feuilletaient, voyaient que ça semblait vrai puisque notre nom y figurait et c'était suffisant. À force d'être là tout le temps, on devient un habitué, forcément, et on ne demande pas à un habitué ce qu'il fait là.

Comment approchais-tu ces artistes pour les photographier ? Une relation de complicité s'est-elle nouée au fil du temps avec certains d'entre eux ?
J'ai effectivement lié quelques liens d'amitié avec certains d'entre eux, comme Aynsley Dunbar et Peter Green, mais ces amitiés-là demandent à être entretenues régulièrement, de se mettre à des diapasons et des modes que je me suis bien gardé de suivre, donc je ne suis pas devenu "pote" à vie avec des musiciens. La vie du musicien, c'est la tournée, et il aurait fallu que je les suive, que j'habite Londres de façon permanente et moi j'étais encore étudiant... Il faut savoir qu'aujourd'hui, à plus de 75 ans, John Mayall passe plus de 200 jours par an sur la route.

Tu as photographié Led Zeppelin à plusieurs reprises. Certains de tes clichés figurent d'ailleurs dans le coffret Collector de leurs trois premiers albums sorti début juin...
Absolument, trois photos. La première est une photo du groupe assez magique. Il y a une ambiance digne d'un tableau italien du 18ème siècle. Il y a toute l'énergie du groupe dans ce cliché. À chaque fois les gens m'en parlent avec des trémolos dans la voix. Même Robert Plant qui l'a vu et qui se souvenait précisément de l'endroit où il avait été pris : un pub perdu de la banlieue de Londres, le Bluesville, où ils ont joué deux fois en 68.
La seconde est une photo de Jimmy Page prise en France dans la région parisienne lors d'un concert de fin d'année organisé par l'École Centrale, le Piston. Et la troisième est un cliché de John Paul Jones pris aussi au Bluesville.

Autre groupe mythique à ton palmarès, les Who...
Je me disais récemment que je n'avais pas fait assez de photos des Who, en revanche celles que j'ai faites, notamment à Paris quand ils sont venus pour une émission de télévision et au festival de Plumpton en Angleterre, celles-là sont vraiment bien parce que je suis très près et que c'était un super concert.
J'ai dû voir les Who une dizaine de fois, ce qui n'est rien. J'ai vu beaucoup Ten Years After, pas mal John Mayall... et certains une seule fois, comme Creedence Clearwater Revival.

 

Tu as également capturé en live l'éclosion de groupes comme Yes ou Pink Floyd...
"Une" des formations de Yes, oui, car c'est un groupe où il y a eu pas mal de changements. Le Floyd c'est une autre histoire… C'est très compliqué à saisir en photo Pink Floyd car le groupe a construit son succès sur la scène à travers ce qu'on appelait à l'époque des light shows, notamment des projections de figures en volutes, aux mouvements très aléatoires, bref tout ce qu'un photographe peut détester lorsqu'il y a déjà très peu de lumière. Le plus difficile à distinguer étant toujours le batteur, Nick Mason, caché la plupart du temps au troisième plan, derrière des cymbales ou des toms, ou un échafaudage des deux...

Je sais que tu as une admiration toute particulière pour John Mayall, pourquoi ?
Parce que John Mayall, c'est le Monsieur Pôle Emploi du blues anglais. Tout le monde est passé chez lui, pas très longtemps parfois parce qu'il engageait les gens aussi vite qu'il les virait. Colin Allen, un très bon batteur qui a joué dans un groupe qui s'appelle Stone the Crows, racontait dans une interview comment Mayall lui avait proposé de rejoindre son groupe, les Bluesbreakers. Alors qu'il s'étonnait de ne pas devoir répéter avant le soir du concert, Mayall lui avait répondu que cela n'était pas "nécessaire". Allen a même joué sur un morceau intitulé "Hartley Quits" évoquant le départ du batteur Keef Hartley qui avait été viré...
Pour la petite histoire, en 1969 à la mort de Brian Jones, le téléphone de Mayall sonne et c'est Mick Jagger qui est à la recherche d'un guitariste remplaçant moins "encombrant". Quelques semaines plus tard, Mick Taylor devenait un Rolling Stone. Il restera avec eux cinq ans sans jamais être autorisé à signer d'autre titre que "Ventilator Blues".

Ton livre nous fait aussi revivre la venue en Europe de grands artistes de la scène américaine, comme Tina Turner, Frank Zappa et B.B. King...
B.B. King, c'est ma passion pour le blues. C'est à ce moment-là l'inspirateur et la référence de beaucoup de guitaristes anglais de l'époque. Si John Mayall, Long John Baldry ou Alexis Korner n'avaient pas ramené dans leurs valises les disques de ces types-là, il ne se serait rien passé. Big Joe Turner, Lowell Fulson, Sonny Boy Williamson par exemple, (un harmoniciste extraordinaire).
En 1971, j'ai assisté au concert d'Ike et Tina Turner à l'Olympia (qui a fait l'objet d'un enregistrement live), probablement le concert le plus représentatif de la carrière du duo. Sur scène Tina était une furie. Nous étions quelques-uns à photographier, dont Jean-Pierre Leloir, Christian Rose, Philippe Gras et Claude Gassian, tous sous le charme de la tigresse et de ses danseuses… Tina Turner portait une robe en métal à fines armatures signée Paco Rabanne, assez courte et légère (qu'elle porte sur une célèbre photo en studio signée Richard Avedon)… Sur quelques-unes de mes photos on peut voir un sein apparaitre de façon fortuite... À postériori, je pense que tout était parfaitement sous contrôle, y compris les accidents de robe… mais ça ne faisait pas scandale à l'époque, comme avec Janet Jackson aujourd'hui.
Frank Zappa, je ne l'ai vu qu'une fois. Pour les Américains, la France n'était pas une destination majeure, ils s'y arrêtaient seulement pour une seule date dans le cadre d'une tournée entre Londres, Berlin et Amsterdam. J'ai donc photographié Zappa dans une salle parisienne qui n'existe plus aujourd'hui, le Gaumont Palace. L'invité spécial de ce soir-là s'appelait Jean-Luc Ponty, un violoniste français très célèbre qui a joué avec Stéphane Grappelli. Le batteur de Zappa n'était autre qu'Aynsley Dunbar (ex Bluesbreakers de John Mayall), que j'avais connu avec son premier groupe, Retaliation. Il a fait une énorme carrière en jouant avec John Lennon, David Bowie, Jeff Beck et une quantité d'autres dont les plus grands noms de la musique anglo-américaine. Mon batteur favori avec John Bonham.

 

Il y a aussi parmi les photos en coulisses cet instant avec Paul McCartney. À quelle occasion était-ce ?
Cette rencontre remonte à la première tournée européenne de Wings. Celle-ci avait débuté dans le sud de la France. J'étais parti pour Extra avec Claude Gassian (qui est l'auteur de cette photo et qui a eu la gentillesse de la retrouver pour cette occasion). C'était la première tournée du premier groupe de Paul après les Beatles et toute la presse d'outre-Manche était forcément à ses trousses pour avoir une interview. Du coup, les journalistes français étaient globalement moins bien "soignés" que leurs homologues anglais. On s'est donc plaint auprès du manager qui a gentiment accepté d'aménager un rendez-vous spécial en tête à tête à l'Hôtel Eden Roc du Cap d'Antibes.
Sur cette photo, on voit effectivement Paul avec sa femme Linda et moi-même, en train de converser dans le lobby de l'hôtel. L'anecdote qui est amusante c'est qu'après l'interview, Mc Cartney est allé saluer un homme d'un certain âge qui se trouvait dans le salon d'à côté. Ce monsieur lui a dit "Ah, mais je vous reconnais, vous êtes l'un des Beatles". Mc Cartney, très intimidé, s'est contenté d'acquiescer et nous de boire du petit lait car ce monsieur, c'était Marc Chagall. Tout le monde était admiratif de Paul Mc Cartney qui lui même l'était de Marc Chagall. Comme quoi on peut rester l'admirateur de quelqu'un, même lorsqu'on est soi-même une star...

Revenons au livre "My Generation, Only Rock and Roll ?", pourquoi ce titre ?
Le titre est un mélange de deux chansons phares : "It's only rock and roll" des Rolling Stones (1974) et "My Generation" des Who (1965). La juxtaposition de ces deux titres en forme de question m'a parue parfaite pour illustrer de quoi il retournait. Le point d'interrogation comptant pour du beurre car la réponse est "non" bien évidemment ! Car cette génération n'était pas QUE rock and roll. Elle était la charnière entre deux mondes. Celui d'avant 68 et celui de Woodstock. Quelque chose venait de changer. Le monde tournait une page dont personne ne mesurait l'importance et qui allait voir éclore des changements monumentaux. Un exemple : sans Steve Jobs, qui est un enfant de cette période de création débridée, pas d'Apple, pas d'I-Phone, pas d'I-Tunes.
Il y aura donc dans ce livre des photos de scène mais aussi des instants backstage. Des Who, avec Keith Moon en coulisses toujours prêt à déconner, John Entwistle, le bassiste, hilare, alors qu'on le connaît "sinistre", Roger Daltrey avec ses dents de l'époque, Fleetwood Mac première période avec Peter Green sur un quai de Seine avec la cape de spahi que je lui avais offerte, John Bonham et Robert Plant de Led Zeppelin en discussion avec Peter Grant, leur manager… Tout le monde est encore jeune et naturel et presque en bonne santé. Les excès n'ont pas encore laissé de traces, sauf chez Clapton que je montre au concert du Rainbow de Londres, organisé par Pete Townshend, avec Steve Winwood et Rick Grech pour le sortir de la drogue mais qui l'a finalement littéralement jeté dans l'alcool...
Ma première intention était de faire un bouquin de photos (inédites pour la plupart), sans texte puis, après avoir choisi les clichés qui me plaisaient, je me suis dit que deux trois légendes ne seraient pas de trop… Après il s'est avéré que ces légendes ne suffisaient pas toujours. Je les ai rallongées, densifiées et j'ai fini par demander à quelques amis d'alors, impliqués dans la musique, de m'apporter leur concours, à coup d'anecdotes et de souvenirs. On peut aussi parler d'un artiste à deux ou trois à partir du moment où ça se complète. Le but n'est pas de faire une encyclopédie mais d'apporter des points de vue et des éclairages différents, de varier les angles aussi dans les textes.

 

Il s'agira je crois d'une édition limitée ?
Limitée ET numérotée, totalement introuvable dans le commerce donc... J'aime bien le côté Happy Few. Ce qui est rare est, de fait, souvent plus intéressant, plus précieux aussi.. Sinon il y a Ikéa et Yellow Corner.
Parmi les renforts d'écriture, il y a Ramon Pipin, guitariste de deux groupes mythiques en France : Au Bonheur des Dames, dont il est à l'origine de beaucoup de succès et Odeurs, un groupe qui était un peu givré, hors cadre dans la lignée du Bonzo Dog Band ou des Mothers de Frank Zappa. C'est un musicien d'une incroyable culture musicale, capable aussi de te raconter l'histoire du micro monté à l'envers de la guitare de Peter Green (dont il est aussi "fan" que moi)…
Le second expert appelé à la rescousse est Billie qui a travaillé sur différentes radios, (RTL, Nostalgie, Radio Monte-Carlo, France Bleu)… On s'est connu il y a trente ans à l'époque où je faisais un peu de radio (Radio Andorre, RFM). C'est une experte en musique californienne et une agrégée des Beatles... Elle va écrire sur Cat Stevens, Donovan, Mick Taylor...
Enfin le dernier appelé en renfort et qui est un ami depuis quarante ans, c'est Jean Mareska. Je l'ai connu chez Barclay, où il était Label Manager avant de rejoindre WEA (pour Warner-Elektra-Asylum) chez qui signeront les Rolling Stones, Led Zeppelin et pour la partie française, Michel Berger, France Gall, Véronique Sanson...
Jean peut donc aussi bien vous raconter ses après-midis de shopping aux Puces avec Jimmy Page que ses souvenirs de studio avec Jean Jacques Goldman (dont il fut un temps le directeur artistique avec Taï Phong), Week End Millionaire ou encore Gilbert Bécaud dont il a produit le dernier disque.
Jean écrivait à l'époque pour les revues dans lesquelles je publiais des photos, dont Pop Music Super Hebdo, un tabloïd hebdomadaire comme son nom ne l'indique pas. On se croisait donc souvent aux concerts. Il est très fort en blues. C'est une vraie plume, auteur de nombreuses biographies (Edith Piaf, Brel, Indochine, etc ..)
Je trouvais donc sympa de les emmener dans cette aventure car pour certains c'est inhabituel. Ramon écrit des scénarios et compose des musiques de film notamment pour Albert Dupontel, Antoine de Caunes et Christian Clavier et Billie est toujours à l'antenne de façon quotidienne.

Pour tous ceux qui souhaitent acheter ton livre, quelle est la démarche à suivre ?
Comme ce livre est destiné à être auto-édité, il ne sera disponible qu'en financement participatif (ce que les Anglais appellent le crowdfunding), via le site Ulule à l'adresse : http://fr.ulule.com/my-generation/
L'opération ne dure que jusqu'au 25 juillet 2014. On met ce qu'on veut à partir de 10 euros (et jusqu'à 1.000 euros), en échange de quoi on reçoit des contreparties. Par exemple pour 10 euros, on a une série de six cartes postales qui sont des photos extraites du livre et qui n'existeront que là. Il s'agit donc d'une exclusivité.
Au-delà de 10 euros, on a des articles "en plus", comme un tirage signé d'une photo extraite du livre, le bouquin avec les cartes postales ou des photos... Plus on avance dans les montants, plus la contrepartie est conséquente. Il existe même une contrepartie taillée sur mesure pour une société désirant faire des cadeaux à ses collaborateurs ou à ses clients permettant d'obtenir quinze livres.
Enfin à partir d'un certain montant de contribution, le souscripteur a son nom mentionné dans le bouquin car c'est aussi grâce à lui qu'il existe. On trouve également des contreparties pour assister à la soirée de lancement où tout le monde sera réuni, les auteurs et moi-même. Le livre sera remis de façon très officielle aux souscripteurs à l'occasion de cette soirée. Tous les exemplaires seront signés et numérotés.
Point très important : si l'aventure ne se trouvait pas entièrement financée au 25 juillet pour le montant demandé , ce livre sera un souvenir ! Il n'existera pas. Évidemment, quelle que soit la somme investie, chaque participant sera remboursé aussi simplement qu'il aura souscrit.
Si l'important est effectivement de participer, il est primordial d'essayer de convaincre quelqu'un autour de vous d'en faire autant et ainsi de suite. Je pars du principe que quelqu'un qui aime bien ces années-là, soit pour les photos, soit pour la musique, doit bien avoir dans son carnet d'adresses quelqu'un qui partage ses goûts. Il peut le lui offrir en cadeau ou mieux encore lui dire "Tiens il y a un livre qui devrait t'intéresser, moi j'en prends un, tu devrais en prendre un également parce qu'il n'y en aura pas beaucoup".
L'autre principe du financement participatif, c'est que lorsqu'on souhaite participer, il faut le faire tout de suite parce qu'après on "procrastine", on se dit qu'on le fera plus tard et on ne le fait jamais. C'est alors trop tard pour tout le monde. Il n'y a pas de joker. Et il n'y a aucun risque puisque si le montant requis n'est pas atteint, c'est remboursé.

 
Propos recueillis par Florence Bouvrot
 

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