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L'hebdo Il a consacré une thèse universitaire au Hellfest
Corentin Charbonnier, 32 ans, chargé de recherche à l'université de Tours et passionné de métal a passé sept ans à élaborer une thèse de 350 pages sur le festival clissonnais.
L’Hebdo de Sèvre et Maine : Comment vous est venue l’idée d’élaborer une thèse sur le Hellfest ?
Corentin Charbonnier : J’écoute du métal depuis que j’ai 15 ans. J’anime une émission de radio sur le sujet. J’ai parcouru de nombreux festivals. Depuis que je suis étudiant en sociologie, en 2003, je voulais faire une thèse sur le métal. Puis mon sujet s’est affiné. Je me suis concentré sur les échanges entre festivaliers, les lieux de rassemblement. Le Hellfest s’est vite imposé car c’est le plus gros festival de métal en France et il se déroule dans une ambiance assez magique.
HSM : Sur quels matériaux avez-vous appuyé vos recherches ?
C.C : J’ai réalisé un gros travail de terrain. A chaque édition du festival, je passais six jours sur place. Je multipliais les rencontres avec les festivaliers que je recontactais plus tard dans l’année et surtout j’en profitais pour échanger avec des artistes pour connaître leur regard sur le festival. Au final, j’ai cumulé près de 300 témoignages dont 150 d’artistes et 100 000 clichés qu’il a fallu analyser. Les organisateurs m’ont aussi beaucoup aidé. Ils étaient toujours là pour m’accompagner et répondre à mes questions.
« Près de 300 témoignages et 100 000 clichés à analyser »
HSM : Existe-t-il un portrait type du festivalier participant au Hellfest ?
C. C : Le public est majoritairement masculin, je dirais à hauteur de 65 %. Après, il se caractérise au niveau vestimentaire soit par des déguisements fun ou bien par des habits noirs. Il est aussi catégorisé par le fait de porter des T-shirts au nom des groupes ou du festival. Les participants achètent et portent beaucoup de produits dérivés. Il y a un vrai sentiment d’appartenance.
HSM : Pour vous, le Hellfest est devenu un marqueur identitaire…
C. C : Oui, le fait de participer au festival est devenu une vraie marque de reconnaissance. Il y a ceux qui l’ont fait et ceux qui ne l’ont pas fait. C’est quasiment devenu une obligation que d’y venir 5 jours pour vivre l’événement. Le Hellfest est devenu la pierre angulaire de l’identité métal. Il y a mêmes des rites, des mythes qui se sont créés autour du festival comme celui de venir participer à des danses géantes comme le pogo.
HSM : Vous parlez du Hellfest comme d’un lieu de pèlerinage. En quoi est-ce comparable à un pèlerinage religieux ?
C. C : Le terme peut surprendre car le métal choque la religion. Il joue avec et blasphème beaucoup. Mais les comportements entre un pèlerin qui va sur les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle et un métalleux qui vient au Hellfest sont les mêmes. Leurs motivations sont identiques, c’est juste leurs formes qui divergent. Il y a une volonté de se retrouver, d’échapper à la pression sociale… Et puis, on peut considérer qu’il y a une forme de religiosité dans le métal car certains artistes sont vus comme des surhommes, des idoles. C’est le cas de Black Sabbath qui revient cette année à Clisson.
HSM : Votre travail a-t-il vocation à être publié ?
C. C : Je l’espère. Le but de mon travail n’est pas de rester confiné à l’université. Je sais qu’il y a une forte attente autour. Le Hellfest avait annoncé la date de ma soutenance sur son site internet. Je me suis retrouvé avec un amphithéâtre plein ce jour-là ! Une cinquantaine de personnes m’ont déjà sollicité pour obtenir le résultat de mon travail. Du coup, je suis à la recherche d’un éditeur pour en faire un livre de 200 pages. J’aimerais qu’il sorte durant le 2e semestre 2016.
Propos recueillis par Julien Chaillou
Corentin Charbonnier (à droite) en compagnie de Mikael Stanne, chanteur du groupe Dark Tranquility, après une interview réalisée dans le cadre de la thèse. -
Retrouvez ci-dessous une vidéo de la soutenance de Corentin Charbonnier. C’est au moment où on lui décerne la mention “Très honorable”.