C'est une histoire vieille comme le monde, l'homme s'est toujours particulièrement
illustré dans ses capacités de destruction. C'est un peu là
la triste histoire des allemands de TURN, eux qui semblaient tout avoir pour
faire fondre le fan d'AOR trop souvent réduit au régime pain
sec et eau depuis 15 ans. Turn disposait à la fois du talent d'écriture,
du savoir faire et d'une recrue de choix en la personne du jeune chanteur
Steffen Lauth et son timbre à la croisée de Steve Lukather (TOTO)
et Joe Elliott (DEF LEPPARD). Tout ça pour arriver où ? Nulle
part. La courte histoire du groupe est une succession de coups de théatre
foireux, de changements de line up à répétition, de retour
éphémères, de crêpages de chignon, et finalement
de gâchis sur toute la ligne. C'est à titre posthume que je reviens
sur ce disque après avoir suivi le groupe dans ses balbutiement par
le biais de la section Coup de Pouce, le groupe un temps rebaptisé
TURN UP ayant décidé il y a quelques mois de définitivement
stopper les frais. Je me souviens encore de ma montée de fièvre
à l'écoute du magnifique Crazy Mama, titre
AOR par excellence, émotionnel et interprété par un Steffen
Lauth époustouflant d'aisance du haut de sa vingtaine d'années.
Un titre où le clavier et l'ambiance qui en découle me rappellent
un morceau très injustement méconnu de DURAN DURAN, l'excellent
Do You Believe In Shame sur l'album Big Thing. Mais ce EP ne saurait
se résumer à ce seul titre, Change The Letters
était également un beau moyen de débuter l'album, mais
c'est plus encore sur les trois derniers titres que je me tournerais, avec
entre autre la superbe ballade Honesty et le classieux mid
tempo Dream Dancer qui éloignaient radicalement Turn
des idées reçues attribuées d'ordinaire aux groupes germaniques.
C'est bien la finesse - et une finesse assez inhabituelle outre Rhin - qui
caractérisait Turn, et ce à tous les niveaux, des arrangements
à la production, en passant bien sûr par le raffinement mélodique
des cinq titres. On notera enfin le bien rock Living In Darkness,
aux faux airs d'hymne, pour conclure sur ce regrettable constat d'échec,
cette impossibilité d'accorder les violons au sein d'un groupe multi-générationnel
qui, plutôt que d'utiliser à bon escient les qualités
de chacun, l'expérience des uns, et la fraicheur des autres, a préféré
s'enfoncer dans des luttes intestines absurdes qui au final n'auront abouti
qu'à une seule chose : priver l'AOR de grands albums...
Highlights : tous les titres.
Tracklist :
01. Change The Letters
02. Crazy Mama
03. Dream Dancer
04. Honesty
05. Living In Darkness