Ce troisième album studio de TESLA tient une place particulière
dans mon estime, dans la mesure où il fut ma porte d'entrée
dans l'univers des californiens de Sacramento. Mais au delà de quelques
considérations vaguement nostalgiques, Psychotic Supper est
à mon avis l'un des deux albums les plus aboutis du groupe avec Mechanical
Resonance. Et pour cause, ce disque met plus que jamais en avant la facette
que je préfère de la bande à Jeff Keith, à savoir
son extraordinaire sens de l'émotion. Les groupes de hard rock capables
de faire preuve d'une telle subtilité sans ne rien sacrifier de leur
puissance de feu ne sont pas si communs. Tesla est de ceux là, capable
de vous aligner des brûlots décapants comme l'infernal Don't
De-Rock Me au côté de compos d'une infinie richesse
émotionnelle comme la sublime et bien nommée semi ballade Song
& Emotion ("semi" ballade, car les changements de rythmes
y sont nombreux, et les interventions des guitaristes bien souvent dévastatrices
!), écrite en hommage au guitariste de DEF LEPPARD Steve Clark - décédé
l'année de la sortie de cet album - avec qui le groupe avait visiblement
lié une forte amitié lors de leur tournée commune quelques
années plus tôt. C'est précisément vers ce genre
de titres que penche le plus ce Psychotic Supper, avec entre autre
le somptueux mid tempo Freedom Slaves, à l'intensité
digne d'un Changes, ou encore le plus rugueux Had Enough
et le superbe Can't Stop et son refrain planant et hyper
léché contrastant avec des couplets nettement plus bluesy. Même
sur le pourtant rugueux Edison's Medicine, Tesla fait souvent
montre d'une grande recherche mélodique, notamment lorsqu'arrive le
refrain. C'est aussi ça, la recette de Tesla, glisser des lignes mélodiques
de génie dans des morceaux qu'on pourrait penser à priori assez
basiques. Et comme à chaque fois que Tesla se livre à la finesse
l'émotion n'est jamais bien loin, ce disque n'est pas avare en moments
forts, intenses même. Lorsque Tesla se focalise sur ses racines 70's
bluesy, l'efficacité est également de rigueur, et même
en n'appréciant que modérément le style, force est de
constater que le groupe y est fort efficace, comme sur le typiquement AEROSMITH
et très groovy Time, ou encore le très bon
Call It What You Want et la ballade acoustique What
You Give sur laquelle Jeff Keith rappelle parfois d'ailleurs le grand
Steven Tyler. Alors certes, on pourra reprocher une certaine schizophrénie
à ce groupe incapable de se fixer sur un style, et déplorer
qu'un groupe de ce calibre n'ait jamais cherché à sortir un
album coulé d'un seul bloc tant ses moments de bravoure sont jouissifs
et fabuleux, mais c'est aussi peut-être cette liberté, cette
volonté de ne pas se donner de limites qui permit au groupe de mettre
au monde des monuments tels qu'il a su en égrainer sur chaque album,
et tout particulièrement sur celui-ci. Le résultat est d'ailleurs
paradoxalement assez homogène, signe d'une très forte identité
de groupe, sans l'ombre d'un doute. Cette identité et cette classe
s'émousseront hélas dès l'album suivant.
Highlights : Freedom Slaves, Song & Emotion, Edison's Medicine,
Had Enough, Can't Stop, Stir It Up, What You Give, Call It What You Want...
Tracklist :
01. Change In The Weather
02. Edison's Medicine
03. Don't De-Rock Me
04. Call It What You Want
05. Song & Emotion
06. Time
07. Government Personnel [interlude]
08. Freedom Slaves
09. Had Enough
10. What You Give
11. Stir It Up
12. Can't Stop
13. Toke About It