La chronique du rock hard N°115, drôle, blessante mais terriblement vraie:
Rock hard N°115
METALLICA
Lulu
Mercury/universal
"Art" rock
C'est une lourde responsabilité que d'avoir à parler de cet album, d'ores et déja mythique, qui voit deux des plus grandes entités de leur temps collaborer le temps d'un projet unique en son genre. Depuis son annonce, ce lulu a déja fait beaucoup parler de lui et-époque oblige- personne ne s'est privé d'y aller de sa petite spéculation sur le taux de probabitité que cette entreprise audacieuse donne naissance à (au choix) 1) l'un des albums marquant de son sciècle 2) un étron. Mais si la critique est aisée, l'art, on le sait, ne l'est guère. Saluons donc comme il se doit le bon gout d'inédit de cette union contre nature. Ceci étant entendu, entrons de plein pied dans le corpus de l'oeuvre susmentionnée afin de nous abreuver de son substrat. Après tout, on ne va pas leur donner le bon dieu sans confession sous le prétexte que Lou Reed a pondu un Berlin d'anthologie en 1973 et que Metallica a donné, en 1986, ses lettres de noblesse au metal le plus puissant qui soit avec un Master of puppets toujours référentiel.
"Brandenburg gate", qui ouvre le 1er disque commence tranquillement comme une ballade acoustique typique de Reed, quand à 50 secondes, Metallica entre en scène. Et là, c'est le drame. Hetfield brame à la lune tel un clochard qui enguirlande le vent, tandis que Lou Reed se met à soliloquer avec l'énergie du pilier de comptoir qui conspue l'augmentation de l'impôt foncier. Pendant ce temps, derrière, ça rame sec: les mets font tourner en boucle (jusqu'a l'exaspération) un riff lourd et pataud dont Tony Iommy ne voudrait pas même pour faire un soundcheck. Sans notre conviction que nous avons à faire à de grands professionnels, ce premier titre pourrai aisément passer pour un jam enregistrée à leur insu, alors que les 5 gusses étaient tous à 4 grammes.
Dans la foulée, "the view" (sur laquelle James Hetfield met toute son énergie à tenter de nous convaincre qu'il est une table) reprend approximativement la même formule, et l'on commence tout doucement à se dire que, s'il a fallu de la persévérance aux uns et aux autres pour sortir ce disque, il va nous en falloir davantage encore pour l'écouter intégralement.
"Pumpin' blood" nous le confirme douloureusement, avec son intro sur laquelle le pauvre Lou a l'air au bord du malaise vagal.
"mistress dread" résume à elle seule l'ampleur des dégats: un riff (trash, en l'occurence) qui n'en est pas un, et un pauvre gars qui semble improviser des paroles sans queue ni tête par dessus. On pourrai continuer la "dithyrambe" ad libidum, mais, cher lecteur, vous avez très probablement mieux à faire que d'accorder du temps à ce disque, et -pour ne rien vous cacher- nous aussi. Soyons fairplay: deux titres échappent de justesse au naufrage: "Iced Honey", pas très bon mais à peu près cohérent et "little dog", ballade éthylique qui aurait pu etre signé par Lou reed en solo. On aurait aimé ajouter "junior date" à la liste, mais ses 20 minutes au compteur en font en excellent sommnifère bien plus qu'une chanson réussie.
"Chanson" est justement le mot de trop dans ce survol de la zone sinistrée, tant Lulu en est singulièrement dépourvu. Un rendu moins approximatif et absurde aurait très probablement permis d'apposer l'étiquette ronflante d' "avant-garde" sur ce pétard mouillé, mais inutile de faire passer les vessies pour des lanternes: ce double album d'une prétention aberrante est un triste ratage dont personne ne sort grandi. On peut raisonnablement penser qu' au travers cette collaboration, Lars ulrich a souhaité donner à son groupe une caution arty (ça colle assez bien avec le personnage), mais on imagine mal avec quels appâts il a réussi à convaincre James hetfield de monter dans ce rafiot éventré. Quand à la "performance" de Lou Reed, jetons sur elle un voile pudique, eu égard aux nombreux services rendus par ce vétéran du rock n' roll. Seuls les fans hardcore des deux parties tenteront de cautionner cette apologie du vide artistique, probablement pour masquer leur amertume. Nous ne mangerons pas de ce pain là. Kill your idols!
Charlelie Arnaud
Note: 2