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genesis paris la defense arena 16 03 2022

Ce que je recherche avant tout dans la Musique, c'est l'émotion. Certes, elle permet aussi de s'amuser, de picoler, de bavarder entre amis, ou encore de faire le ménage, pousser un panier de supermarché, courir en forêt, ou pisser dans les toilettes publiques. Moi, j'y vois l'occasion de m'émouvoir, de m'évader du monde réel, d'oublier les râleurs, les rabat-joie, et de partager des instants de grâce avec les musiciens et des mélomanes. Ce soir, j'ai été servi.

CONTEXTE.

L'arène de La Défense, située sur le territoire de Nanterre (contrairement à ce que prétend son intitulé), peut accueillir jusque 40 000 personnes en configuration concert, depuis octobre 2017. Un précédent concert dans cette salle ne m'avait pas laissé un bon souvenir. Etait-ce dû à l'acoustique inadaptée, était-ce dû à la sonorisation inadéquate ; toujours est-il que je n'avais guère apprécié le son. De surcroit, en étant placé en balcon opposé à la scène, l'éloignement était tel que j'en étais réduit à souvent regarder les écrans. Au point de me demander si je n'aurais pas mieux fait d'attendre une parution DVD pour la savourer dans mon canapé. En fin de cette soirée, je m'étais promis de ne plus revenir…

Mais évidemment il y a toujours un fait contrariant à toute intention, qu'elle soit bonne ou mauvaise. Les promoteurs ont décrété que GENESIS devait s'y produire. S'agissant sans doute de la dernière occasion de revoir cette vénérable institution du rock progressif britannique, je m'interdis de mépriser ce rendez-vous, en dépit de l'inquiétant état de santé de Phil Collins. En dépit aussi des prix exorbitants et inadmissibles des places qui semblent s'adresser à une élite de quinquagénaires assez mélancoliques et fortunés pour s'offrir les meilleurs emplacements.

Selon sa génération, selon ses émotions, ses coups et ses douleurs ressentis au fil de la carrière de ces artistes britanniques atypiques, chaque admirateur aura sa période préférée. Pour ma part, comme beaucoup, je considère que l'âge d'Or se situe entre 1971 et 1977, lorsque le trio actuellement en place était accompagné de Peter Gabriel (1967–1975) et de Steve Hackett (1971–1977). Je pourrais même débuter ladite période à octobre 70 avec "Tresspass" qui constituait déjà la genèse (désolé, je n'ai pas résisté !) de leur succès. Cependant, j'apprécie globalement l'ensemble de l'œuvre de ces pionniers du rock progressif.

Mais, hélas je n'ai pas été sensibilisé à leur talent avant le début des années 80, durant lesquelles les radios émettaient inlassablement "That's All" et "Mama". Ce n'est que le 3 juin 1987 que j'ai pu voir Genesis sur la scène de l'Hippodrome de Vincennes à PARIS (12ème) moyennant la somme (déjà considérable à l'époque) de 150 francs. Aux pupitres claviers, basse, percussions, chant et guitare c'était le même quatuor qu'aujourd'hui qui promouvait "Invisible Touch" (1986), leur treizième album depuis dix-huit années.

La discographie de Genesis présente désormais quinze albums studio enregistrés entre 1969 et 1997. Ce concert ne s'inscrit donc pas dans une tournée promotionnelle ; aucun nouvel album n'est paru depuis des décennies. Il s'agit plutôt de l'émouvant adieu de ces musiciens légendaires à son public qui attendait ce retour depuis trop longtemps. Je ne les aurai vus que deux fois en cinquante-cinq années, mais j'ai pu emmener ma compagne et mon fils pour qu'ils réalisent ce qu'est le talent maitrisé. Voilà qui est fait, amen.

Je me rends ainsi à ce concert comme à un complément de celui de Steve Hackett, leur ancien comparse, auquel j'ai assisté à la salle Pleyel à l'automne dernier.

Pour l''accès à cette grosse baleine qu'est l'arène, il faut beaucoup marcher, beaucoup patienter pour les fouilles, un peu moins pour valider les codes-barres, mais surtout avoir une forme athlétique pour accéder aux balcons. Car les gueux pas assez aisés pour bénéficier de places assises en fosses, quel que soit leur âge, doivent affronter quatre séries d'escaliers, sans doute pour les inciter, une fois parvenu au pigeonnier, à payer une boisson à la première échoppe venue… Ces enfoirés n'ont pas eu ce plaisir en ce qui me concerne. Non mais dites donc …

Je dois cependant confesser avoir céder à la tentation d'un 90ème t-shirt pour ma collection. Le montant (40 €) pouvait pourtant paraitre rédhibitoire, mais l'évènement ultime me semble pouvoir justifier ce nouvel écart de conduite.

Aujourd'hui, nous retrouvons ainsi deux membres fondateurs Tony Banks (claviers, guitare-12-cordes, chœurs ; 1967–2000, 2006–2007, et depuis 2020), et Mike Rutherford (basses, guitare, chœurs ; 1967–2000, 2006–2007, et depuis 2020). Monsieur Phil Collins (batteur de 1970 à 1996 et de 2006 à 2007) est présent aussi, mais diminué physiquement au point qu'il a dû renoncer aux fûts depuis 2007. Sa participation se limitera donc au chant (1975–1996, 2006–2007, et depuis 2020), assis sur un tabouret.

Deux musiciens, pas tout à fait étrangers au trio légendaire, apportent leur précieux soutien à l'occasion de la tournée actuelle, "The Last Domino ?". Daryl Stuermer (guitare, basse, chœurs ; 1977/8–1992, 2006–2007, et depuis 2020), et le fils à son papa, Nic Collins (drums, percussion ; depuis 2020). Il a été jugé opportun (…) de soutenir les parties vocales avec Daniel Pearce (chœurs ; depuis 2020), Patrick Smyth (chœurs ; depuis 2020).

Immanquablement, je me doutais bien que j'allais assister à une soirée chargée en émotions. Le handicap de Phil Collins s'est avéré d'autant plus émouvant qu'il nous renvoie en pleine figure la dure réalité du temps qui passe inexorablement. Il convient de rappeler qu'il a été diminué par une pancréatite, par deux opérations du dos, en 2009 et en 2015, ainsi que par son diabète ; tout cela laisse forcément des traces.

Lui qui était si dynamique et puissant, il nous est apparu avec une canne pour accéder à son fauteuil, dont il n'a plus bougé. Mais passé cette douloureuse étape, le concert fut un éblouissement permanent ; les musiciens demeurent talentueux, l'éclairage fut somptueux, la sonorisation puissante et audible a permis de savourer les musiques pleines d’harmonie, de poésie et d'énergie. Les années 80, largement représentées, auraient pu nous frustrer en tant que progueux axés sur les 70's, mais j'ai pris un immense plaisir immersif. Durant près de deux heures et demie, (20h30-22h55) nous avons voyagé dans le temps avec cette vénérable institution du rock progressif britannique qui rentre désormais dans la légende.

L'amplification sonore est astucieusement répartie dans l'espace et l'ingénieur a su doser la puissance et la qualité pour le plaisir des auditeurs quelle que soit son emplacement. Même si la frappe du p'tit Nic m'a parfois paru un peu surexposée, sans jamais être nuisible au reste.

L'éclairage constitué de cinq blocs mobiles de quatre rampes de projecteurs multicolores surplombe la scène et un dispositif au-dessus de la fosse vient parfaire les ambiances lumineuses. Le tout crée des atmosphères extraordinaires de subtilités et de nuances de couleurs.

En fond de scène, plusieurs panneaux écrans verticaux peuvent selon l'ambiance créer des images multiples ou constituer un écran géant. Ce jeu d'images montre en alternance les artistes sur scène et ou des illustrations de titres. De chaque côté de la scène, un écran intermédiaire et un écran plus grand permet au public éloigné de profiter de plans rapprochés. Ces cinq écrans sont les bienvenus dans cette immense salle.

Quant à la scène elle-même, pas de décor particulier. Chaque pupitre jouit bien évidemment de tout l'espace requis. Vu mon emplacement, je ne suis pas en mesure de détailler le matériel déployé, mais à quoi bon chacun peut aisément imaginer que Monsieur Tony Banks ne se contente pas de matériel Bontempi.

Dès les premières minutes de cette "Turn It On Again", des frissons m'ont envahi depuis la colonne vertébrale jusqu'à mes bras, des larmes d'émotions ont embués ma vue. Je sais, je suis un grand émotif et je ne m'en soigne même pas. Quel doux sentiment que de pouvoir s'abandonner à un tel enivrement, sans retenue ! Une spirale de sensations visuelles et sonores m'emporte dans un espace intemporel ; elles sont à la fois délicieuses et douloureuses. Certes le Phil a pris un sacré coup de vieux et ça fait mal. Mais son obstination à vouloir communier une dernière fois avec son fidèle public impose notre respect et relève de l'abnégation. Car il l'a dit lui-même, il n'a plus besoin de cette tournée pour subvenir à ses besoins, il le fait pour nous faire plaisir une dernière fois, tout simplement. J'aurais aimé un tel volontarisme de la part de Peter et de Steve, mais bon c'est comme ça épicétou.

Ma crainte en venant ce soir portait légitiment sur la crédibilité de la prestation de Phil. Sa voix n'a certes plus la prestance, ni la justesse, ni la tessiture assurée des 80's, mais elle reste identifiable et satisfaisante. En tout cas, sa prestation m'a paru honorable. Le soutien des choristes est le bienvenu, mais son rôle est juste de magnifier l'interprétation des titres emblématiques. Par ailleurs, il conserve son esprit espiègle et aime toujours communiquer, parfois avec un français hésitant, avec son public qui n'attend que cela.

Juste après "Duchess", il présente ses complices. Son émotion est visible lorsque Mike le présente à son tour et qu'il reçoit une ovation décuplée. En préambule à "Domino", il invite alternativement le public à sa gauche, à sa droite ou au centre, à répondre à ses invectives ! Une belle communion.

Mike et Tony ont pour leur part assuré leur pupitre à la fois stoïques et concentrés. Les images montraient parfois un rictus dénonçant un réel plaisir d'être là, mais pas d'exubérance ; ce n'est pas le genre de la maison. Leur talent est démontré sur toutes les séquences et c'est bien l'essentiel. Mike assure de bien belles partitions à la guitare ; je souligne tout particulièrement le final de "No Son of Mine".

Nic assure sa partie avec fougue et une redoutable efficacité qui peut rendre fier son papa.

Daryl n'a pas à rougir de sa prestation ; son style est certes différent de Steve mais à mon sens il mérite son pupitre dans ce groupe. Personnellement, je déplore même ce strapontin dont il doit se contenter depuis maintenant plus de quarante-huit années. Ce statut me rappelle celui de John Wesley au sein de Porcupine Tree.

En deuxième acte, les musiciens se sont regroupés au-devant de la scène pour interpréter quelques titres en semi-acoustique. Magnifique moment également.

Dans un espace aussi vaste, il est souvent difficile de créer une atmosphère festive et fusionnelle, d'autant plus que la fosse était constituée de rangées de sièges destinés à des admirateurs au moins aussi âgés que les artistes sur scène. La réaction du public fut à la fois chaleureuse et respectueuse. Les ovations n'étaient pas déchainées mais elles montraient cependant une réelle satisfaction de connaisseurs passionnés. L'auditoire n'a cessé de répondre aux incantations de Phil.

Quant au programme, comme d'habitude chacun pourra émettre un regret pour tel titre omis ou tel album insuffisamment visité, mais il faut reconnaitre que cent quarante-cinq minutes ont permis de sélectionner une belle brochette de titres magnifiques. Néanmoins, puisque c'est mon récit, je me permets de déplorer la surexposition de l'opus "We Can’t Dance" avec trois titres, alors que "Wind & Wuthering" mon opus favoris n'aura été évoqué qu'une seule fois. Plus globalement, les 70's n'ont été évoqué que sept fois.

Vingt-trois titres interprétés plus ou moins complètement ; cinq titres de "Invisible Touch" (1986), quatre titres issus de "Genesis" (1983), quatre titres issus de "Selling England by the Pound" (1973), trois titres issus de Duke (1980), trois titres issus de "We Can’t Dance" (1991), deux titres issus de "The Lamb Lies Down on Broadway" (1974), un titre issu de "And Then There Were Three…" (1978), un titre issu de "Wind & Wuthering" (1976).

Programme :
Intro : Dead Already (titre de Tom Newman)
Behind the Lines / Duke's End (Duke, 1980)
Turn It On Again (Duke, 1980)
Mama (Genesis, 1983)
Land of Confusion (Invisible Touch, 1986)
Home by the Sea (Genesis, 1983)
Second Home by the Sea (Genesis, 1983)
Fading Lights (deux premier couplets) (We Can’t Dance, 1991)
The Cinema Show (deuxième moitié ; avec extraits de "Riding The Scree" & "In That Quiet Earth") (Selling England by the Pound, 1973)
Afterglow (Wind & Wuthering, 1976)
Partie acoustique
That's All (Genesis, 1983)
The Lamb Lies Down on Broadway (The Lamb Lies Down on Broadway, 1974)
Follow You Follow Me (…And Then There Were Three…, 1978)
Duchess (Duke, 1980)
(présentation du groupe)
No Son of Mine (We Can’t Dance, 1991)
Firth of Fifth (extrait instrumental) (Selling England by the Pound, 1973)
I Know What I Like (In Your Wardrobe) (extrait "Stagnation") (Selling England by the Pound, 1973)
Domino (Invisible Touch, 1986)
Throwing It All Away (Invisible Touch, 1986)
Tonight, Tonight, Tonight (deux premier couplets) (Invisible Touch, 1986)
Invisible Touch (Invisible Touch, 1986)
RAPPEL :
I Can't Dance (We Can’t Dance, 1991)
Dancing With the Moonlit Knight (Selling England by the Pound, 1973) (intro & premier couplet seulement)
The Carpet Crawlers (The Lamb Lies Down on Broadway, 1974)




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